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Paris-Normandie 21/10

Une mairie peut-elle installer une crèche de Noël? Le Conseil d’Etat se pose la question

Publié 20/10/2016

Une mairie peut-elle installer une crèche de Noël dans ses locaux? Pour examiner cette question très sensible, dans un pays à vif sur la question de la laïcité, le Conseil d’État se réunit vendredi au plus haut niveau.

L’»assemblée du contentieux» de la plus haute juridiction administrative française, formation de 17 juges présidée par le vice-président du Conseil d’État, examine vendredi à 9h00 deux affaires liées à l’installation de représentations de la scène de la Nativité dans des bâtiments administratifs.

L’une concerne la mairie de Melun (Seine-et-Marne), l’autre le conseil général de Vendée. Dans les deux cas, l’installation de crèches est contestée par deux associations, la «Fédération des libres penseurs de Seine-et-Marne» et la «Fédération de la libre pensée de Vendée».

Cette «Assemblée du contentieux», qui se réunit rarement, «statue sur les affaires d’importance majeure et les grandes étapes de la jurisprudence», explique le Conseil d’État. Elle rend sa décision quelques semaines après l’audience.

La question qui se pose cette fois, telle que la résume le Conseil d’État, est la suivante: «Une crèche de Noël est-elle un signe ou emblème religieux dont l’installation dans un bâtiment ou emplacement public est systématiquement interdite par les dispositions de la loi du 9 décembre 1905 garantissant le respect du principe de laïcité?»

Pour le juge administratif de dernier recours, il s’agit de remettre de l’ordre. Le Conseil d’État hérite de deux décisions contradictoires, prise à quelques jours d’intervalle en octobre 2015 par deux cours administratives d’appel distinctes.

Celle de Nantes a validé l’installation d’une crèche au conseil général de Vendée. Celle de Paris a au contraire donné raison à l’association qui refusait l’installation d’une crèche à la mairie de Melun.

Les santons avaient provoqué une vive controverse à l’approche de Noël 2015, certains maires partant en croisade pour défendre les crèches, dans une France meurtrie par les attentats du 13 novembre.

– ‘Valeur culturelle’ ou ‘cultuelle’ ?

Le débat sur la laïcité voire l’identité n’est jamais retombé depuis, s’enflammant cet été autour du «burkini».

L’affaire était également remontée jusqu’au Conseil d’État, qui avait invalidé une série d’arrêtés pris par certaines communes pour interdire ces tenues de bain islamiques très couvrantes.

Pour Me Alexandre Varaut, qui avait plaidé pour le département de Vendée en appel à Nantes, la crèche est «un symbole culturel, pas cultuel», «les gens ne prient pas» devant elle, «il n’y a pas d’installation par un prêtre».

L’avocat fait valoir que le conseil général ne met pas en place d’installation particulière pour Pâques «qui est la fête la plus importante pour les chrétiens.»

«Noël est pour tout le monde. C’est une fête de la famille, des enfants», explique Me Varaut à l’AFP.

«Ce n’est pas parce qu’une crèche a une valeur culturelle ou festive qu’elle n’a pas aussi une valeur cultuelle», ce qui interdit d’en installer «dans des lieux administratifs publics», réplique Me Régis Froger, qui défendra vendredi au Conseil d’Etat la position des libres penseurs.

«Quiconque entre dans le hall d’une mairie par exemple doit avoir un sentiment de neutralité total», explique-t-il à l’AFP. «Il y a d’autres façons de représenter Noël: un sapin, des guirlandes etc.» ajoute l’avocat.

En 2013, le Conseil d’Etat s’était prononcé sur une affaire mêlant folklore et religion, pouvoirs publics locaux et libres penseurs.

Il s’agissait des «Ostensions septennales», processions catholiques organisées depuis le Moyen Âge autour de reliques de saints du Limousin, et inscrites en 2016 au «patrimoine culturel immatériel de l’humanité» de l’Unesco.

Le Conseil d’Etat avait estimé que les organisateurs de ces manifestations ne pouvaient pas prétendre à des subventions publiques.

 

Huffingtonpost 21/10

Jésus en mairie où les dangers d’une laïcité à géométrie variable

La laïcité à géométrie variable est toujours un mauvais signal. Comment faire accepter d’enlever son voile en classe si l’on tolère le santon de Jésus dans les mairies?

Caroline Fourest

Levons tout de suite un malentendu. On peut être laïc et adorer les crèches de Noël. Surtout lorsqu’on a grandi en Provence, ce qui est mon cas. Je garde un souvenir ému de ces moments : les balades en forêt pour aller chercher la mousse, l’achat des santons au marché (les rois mages étaient mes préférés), la composition du village, comme un théâtre, sur la cheminée. Moments magiques.

La loi de 1905 n’interdit à aucune famille de reproduire cette magie de Noël, chez elle ou au marché. La question est de savoir s’il faut mimer la naissance de Jésus, sur fonds publics, dans nos maisons communes que sont les Mairies ou les Conseils généraux ? La réponse est non.

La loi de 1905

Même aux Etats-Unis, cette pratique est jugée contraire au “Mur de Séparation”. En France, la loi de 1905 et son article 28 sont très clairs : “Il est interdit, à l’avenir, d’élever ou d’apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics”.

C’est pour défendre cette séparation, notre laïcité commune, que la Libre Pensée a porté plainte contre plusieurs mairies et conseils généraux violant la loi. Un tribunal administratif lui a donné raison contre le Conseil Général de Vendée. Depuis des années, il choisit d’exposer dans son hall, sur fonds publics, deux statues géantes de Jésus et Marie…

Une gifle à la Séparation que l’on doit à Philippe de Villiers, parfait ambassadeur de cette Vendée cléricale et anti-laïque, sauf bien sûr s’il s’agit de guerroyer contre l’Islam. Toujours un peu rétif à accepter la loi des hommes, le vicomte a qualifié le rappel à la loi républicaine de “totalitaire”.

Quant au maire de Béziers, Robert Ménard, il a carrément appelé à la “désobéissance civile” et installé une crèche de Noël dans sa mairie.

Dans ces deux cas, au moins, les choses sont claires. En bafouant la loi de 1905, en traitant la République de dictature anti-chrétienne lorsqu’elle veut faire respecter la Séparation, l’extrême droite et la droite cléricale se dévoilent… Leur conversion tardive à la laïcité n’est qu’un leurre et une conviction uniquement valable pour l’Islam. Autant dire une imposture parfaite.

Mais d’autres citoyens, de bonne foi cette fois, ne voient pas où est le problème. Ceux-là doivent lever leurs yeux des santons et voir plus loin. Car c’est tout l’équilibre de la Séparation que menacent l’ouverture du bal des accommodements. Si on fait une exception pour le petit Jésus, pourquoi ne pas le faire pour d’autres ?

L’engrenage des accommodements

En cédant à la mode sympathique des crèches de Noël, la France risque de mettre le doigt dans un engrenage de revendications et de rivalités communautaires sans fin.

La laïcité à géométrie variable est toujours un mauvais signal. Comment faire accepter d’enlever son voile en classe si l’on tolère le santon de Jésus dans les mairies ?

En matière d’égalité des religions, il n’existe que deux chemins. Soit vous veillez à ne pas privilégier une religion sur une autre par la Séparation, soit vous les reconnaissez toutes et c’est la course aux dérogations. Ce qu’il nous faut, c’est une règle claire et valable pour tous.

Besoin d’un avis clair du Conseil d’Etat

En Vendée, la Libre pensée a gagné. Mais à Melun, contre une autre crèche en marie, elle a perdu. Les décisions de justice variant d’une ville et d’un tribunal à l’autre, il a donc fallu se tourner vers le Conseil d’Etat pour y voir clair.

Son rapporteure public, Aurélie Bretonneau, estime que l’article 28 de la loi de 1905 “n’interdit pas d’installer des crèches sur le domaine public”, à moins d’une “intention religieuse”. C’est donc une autorisation “sous conditions”, qui manque de précision.

S’il s’agit seulement d’interdire le “prosélytisme religieux”, comme le précise la rapporteure, certains maires auront vite fait de considérer que représenter un enfant dans une crèche n’a rien de particulièrement “prosélyte”.

En réalité, c’est la présence même de signes ou de personnages liés à une religion qui doit être, plus clairement, interdit. La solution que je propose dans Génie de la laïcité va dans ce sens. Elle respecte à la fois la tradition et l’article 28 de la loi de 1905 : oui aux crèches culturelles, mais sans signe religieux dans les bâtiments publics.

Des crèches profanes

On peut composer des crèches mettant en scène un village provençal, sans Jésus ni Rois mages, ni Joseph ni Marie. Il y a bien d’autres personnages parmi les santons. Certains racontent les vieux métiers de Provence : un meunier, un puisatier… Ces crèches-là nous parlent de nos régions, de notre culture, de ce qui nous rassemble et non de ce qui nous divise. Ces crèches-là, culturelles, non confessionnelles, peuvent avoir leur place dans des bâtiments publics.

À l’image du sapin de Noël, ce beau symbole païen récupéré par les chrétiens, et qui transcende les frontières religieuses. L'”arbre de vie”, comme les fêtes de fin d’année, marquent surtout le passage à l’hiver. Vouloir purger l’espace public d’un sapin ou d’un santon, par peur de froisser les “autres cultes”, relèverait de l’acculturation. Afficher un Jésus dans nos mairies trahit un vieux de fond de suprématie identitaire.

Entre les deux, personne n’a rien trouvé de mieux que le chemin de la Séparation. Elle nous permet de trier le bon grain de la culture de l’ivraie de la domination.

 

Libération 21/10

 Laïcité : ma crèche de Noël contre ton burkini (et vice-versa)

Par Bernadette Sauvaget — 21 octobre 2016 à 17:05

Face aux «crispations», privilégier «l’apaisement» : le rapporteur public du Conseil d’Etat qui se penchait sur l’installation de crèches de Noël dans des bâtiments publics, a estimé vendredi qu’elles pouvaient être autorisées sous certaines conditions.

Par les temps qui courent, les débats politiques, à force d’invoquer la laïcité, pourraient accabler. Voilà donc le très sérieux Conseil d’Etat contraint de trancher une question qui, comme le burkini cet été pourrait, en d’autres circonstances et vue de plus loin (et sans doute de plus haut) que l’Hexagone, prêter à de grands éclats de rire. Il a fallu que la plus haute instance administrative du pays se livre, ce vendredi, à une grave réflexion juridique et philosophique, une exégèse patrimoniale : qu’est-ce donc ontologiquement qu’une crèche ? Un symbole religieux ? Une coutume culturelle et festive ? L’un excluant l’autre ou l’un s’additionnant à l’autre ?

Un vilain piège, en fait. On imagine mal, à deux mois des fêtes de fin d’année, le Conseil d’Etat interdire purement et simplement les crèches dans les bâtiments publics (les mairies ou les conseils généraux, en l’occurrence) après avoir de facto, fin août, autorisé le port du burkini sur les plages en invalidant les arrêtés pris par quelques municipalités. On imagine le tollé que susciterait une telle décision, mettant, s’il le fallait encore, un peu plus d’huile sur le feu : des cris d’orfraie de tous les identitaires et de leurs affidés, des tweets rageurs de l’abbé Grosjean, une chronique vengeresse d’Eugénie Bastié, une homélie courroucée du très réactionnaire évêque de Bayonne, Marc Aillet, et peut-être même un défilé (maigrelet) de Civitas. On imagine aussi les politiques sommés, les uns après les autres, de prendre position pour ou contre l’âne et le bœuf.

Pour sortir de l’ornière, le Conseil d’Etat, très agité ces derniers jours par cette question, devra trouver une voie médiane, assortir l’autorisation de quelques interdictions. Pourtant il n’échappe à personne que si la crèche a fait, l’hiver dernier, sa réapparition dans plusieurs bâtiments publics, ce n’était pas pour défier la loi de 1905 et la laïcité. N’en déplaise à la Fédération nationale de la libre pensée qui a porté le débat sur le terrain juridique. Mettons de côté des traditions bien établies comme celles de l’Alsace concordataire. Le message envoyé par ces maires était d’affirmer haut et fort les «racines chrétiennes» de la France. Non pour faire plaisir à quelques électeurs catholiques intransigeants. Mais pour faire pièce à l’islamisation rampante qu’ils redoutent et fantasment. Bref, le clash des civilisations à portée de santons. Voilà comment on prend en otage le droit et les débats de fond.

 

vsd actualité 21/10

Publié le vendredi 21 octobre 2016 à 10:44  par Luca Andreolli

Polé­mique La crèche de Noël pour­rait être bannie par l’Etat

Symbole reli­gieux pour les uns, simple tradi­tion popu­laire et fami­liale pour les autres. Le Conseil d’Etat doit tran­cher sur la léga­lité des repré­sen­ta­tions du petit Jésus et de la Vierge Marie dans les mairies et bâti­ments publics de France.

On l’a vu tout l’été avec la polé­mique sur le Burkini, le maillot de bain couvrant le corps des musul­manes. L’ap­pli­ca­tion de la laïcité est un sujet haute­ment sensible, qui soulève diffé­rentes inter­pré­ta­tions et problé­ma­tiques : doit-on tout cacher, ou au contraire, doit-on tolé­rer à juste échelle ? Ne risque-t-on pas de faire un deux poids deux mesures ? C’est juste­ment sur cette ques­tion que l’Etat planche actuel­le­ment. La commu­nauté chré­tienne voit les fêtes de fin d’an­née arri­ver à grand pas et avec, leur lot de tradi­tions, comme par exemple, la crèche de Noël. Petit Jésus, Vierge Marie, Rois mages et animaux de ferme ont-ils droit de cité ? Si l’on inter­dit à la commu­nauté musul­mane de se couvrir dans l’es­pace public, il paraî­trait alors équi­table que les signes de chré­tienté ne soient pas non plus visibles dans les collec­ti­vi­tés terri­to­riales, comme les mairies notam­ment.

Le débat crée déjà des cris­pa­tions. Alors, pour éviter l’im­passe, le Conseil d’Etat a convoqué ce matin son Assem­blée de conten­tieux, qui regroupe 17 juges char­gés d’exa­mi­ner les affaires qui « présentent une impor­tance remarquable ». L’objet de ce concile à bulle est simple, il s’agit de tran­cher sur la léga­lité de la crèche de Noël ou non dans les bâti­ments offi­ciels d’Etat. Cette repré­sen­ta­tion de la Nati­vité est norma­le­ment pros­crite dans un « empla­ce­ment public » par la l’ar­ticle 28 de la loi de 1905, ayant attrait à la sépa­ra­tion de l’Eglise et l’Etat. Mais l’in­ter­pré­ta­tion peut être double. D’un côté, il y a ceux qui la consi­dèrent comme un signe reli­gieux. De l’autre, on estime qu’il s’agit simple­ment d’une tradi­tion popu­laire, certes issue de la reli­gion, mais qui n’est pas incom­pa­tible avec les fonde­ments de la laïcité.

La crèche de Noël « scinde les indi­vi­dus en commu­nau­tés, c’est le contraire de la Répu­blique »

L’avis du rappor­teur public a été rendu ce midi : il ne voit pas d’entrave à la laïcité. S’il est très souvent suivi par les juges, c’est la posi­tion de la plus haute juri­dic­tion admi­nis­tra­tive qui fera juris­pru­dence, dont la déci­sion sera rendue dans quelques semaines. En atten­dant, David Gozlan, le secré­taire géné­ral de la Fédé­ra­tion natio­nale de la Libre pensée, une orga­ni­sa­tion de laïcards, appelle à « mettre fin à la caco­pho­nie ». Selon lui, la mise en scène de la nais­sance de Jésus est « un épisode de la Bible, un épisode reli­gieux qui n’a pas sa place » dans un bâti­ment public puisqu’il contre­dit la « neutra­lité des lieux », explique-t-il dans les pages du Figaro. Il pour­suit : « Si, dans la maison commune, vous mettez un signe reli­gieux, vous scin­dez les indi­vi­dus en commu­nau­tés, c’est le contraire de la Répu­blique ». Un argu­ment qui fait douce­ment sourire certains élus atta­chés au folk­lore des tradi­tions « judéo-chré­tiennes ».

Le député Répu­bli­cain du Vaucluse, Julien Aubert, a proposé deux amen­de­ments du fameux article de la loi de 1905, prônant une excep­tion. Pour lui, la crèche de Noël n’est pas un symbole « cultuel » mais un symbole « cultu­rel ». « Je n’ai pas peur des petits bonhommes en argile », enté­rine-t-il plus légè­re­ment. On le comprend mieux ainsi, le Conseil d’Etat va avoir les pires diffi­cul­tés à tran­cher. L’an dernier, deux affaires aux arrêts de justice diamé­tra­le­ment oppo­sés avaient été le témoin de cette dualité. La cour d’ap­pel de Paris avait banni la crèche de Noël dans la cour de l’hô­tel de ville de Melun (Seine-et-Marne), pendant que dans le même temps, celle de Nantes donnait sa béné­dic­tion à l’ar­ri­vée des santons au sein du conseil dépar­te­men­tal de Vendée.

Francetvinfo :

Crèches de Noël dans des mairies : “Ce n’est pas du tout une revendication des croyants”, réagit un prêtre

Le père Louis-Marie Guitton, qui exerce en Provence, affirme que les crèches en mairie sont un faux débat pour les catholiques, et milite pour une laïcité ouverte

Des crèches de Noël peuvent-elles être installées dans des bâtiments administratifs, et en particulier dans des mairies ? C’est à cette épineuse question que le Conseil d’Etat va devoir répondre, après que son rapporteur a rendu un avis favorable, sous conditions, vendredi 21 octobre. Prêtre dans le diocèse de Fréjus-Toulon (Var) et responsable de l’Observatoire socio-politique du diocèse, le père Louis-Marie Guitton, lui, y est plutôt défavorable. Il explique pourquoi à franceinfo. 

‘Eglise catholique milite-t-elle pour avoir des crèches dans les mairies au moment de Noël ?

 

Louis-Marie Guitton : On n’a jamais demandé à en avoir. Ce n’est pas du tout une revendication des croyants, et on ne se battra pas pour ça. Les catholiques ont des crèches chez eux, et à l’église. Ce sont des signes qui nous aident à croire, on y est attachés, mais l’Eglise n’en a jamais fait un étendard.

Le rapporteur du Conseil d’Etat estime qu’une crèche de Noël dans un bâtiment public n’enfreint pas le principe de laïcité, dès lors qu’elle respecte plusieurs conditions précises. Que pensez-vous de cet avis ?

Je trouve qu’il est sage, qu’il représente une forme d’apaisement. Il faut dédramatiser le débat. Le problème aujourd’hui est qu’on se trouve entre deux extrêmes : d’un côté, une interprétation fermée de la laïcité, qui voudrait retirer tous les signes religieux de l’espace public. Et de l’autre, un jeu politique qui n’a plus rien à voir avec l’expression de la foi dans le domaine public. Il faut une place pour une position d’équilibre. C’est tout aussi vrai pour le catholicisme, qui est une religion de l’incarnation, que pour la kippa juive ou le voile musulman, qui n’ont jamais choqué les catholiques.

 

Ce débat sur les crèches de Noël installées dans les mairies est-il important ?

 

Pour nous, Noël est un temps de paix, donc il n’y a pas lieu d’entrer dans des guerres inutiles. C’est toujours sain qu’il y ait un débat, mais ces histoires de crèche installées dans les mairies ne sont pas une priorité aujourd’hui.

Je préfère rappeler que l’histoire que raconte la crèche est dramatique au départ : ce sont des gens qui n’ont pas trouvé à être hébergés, un couple qui cherche une maison. Ca peut nous ramener à l’actualité, non ? La crèche est tout le contraire d’un signe de fermeture.

Que pensez-vous des élus et hommes politiques qui, à l’approche des élections, ne cessent d’invoquer l’identité chrétienne de la France ?

Ce qui est assez savoureux, c’est qu’il y a quelques années, voire quelques mois, on disait que les catholiques avaient disparu de l’échiquier politique.

Aujourd’hui, c’est à celui qui veut envoyer le message le plus fort vers l’électorat catholique, ou bien pour exclure d’autres religions, comme l’islam.

En France, ce n’est pas un problème récent. L’écrivain nationaliste Charles Maurras avait déjà fait une utilisation culturelle et identitaire de la foi chrétienne. On assiste aujourd’hui au même genre de phénomène, avec des gens qui voudraient rappeler l’histoire chrétienne de la France pour l’instrumentaliser, jouer sur les peurs, ou surfer sur une vague parce qu’il y a des élections.

 

Libération 21/10 :

 

Débat sur les crèches : pas d’feu aux santons

Par Bernadette Sauvaget, Journaliste religions pour “Libé”

Par les temps qui courent, les débats politiques, à force d’invoquer la laïcité, pourraient accabler. Voilà donc le très sérieux Conseil d’Etat contraint de trancher une question qui, comme le burkini cet été, pourrait, en d’autres circonstances et vu de plus loin (et sans doute de plus haut) que l’Hexagone, prêter à de grands éclats de rire. Il a fallu que la plus haute instance administrative du pays se livre, ce vendredi, à une grave réflexion juridique et philosophique, une exégèse patrimoniale : qu’est-ce donc ontologiquement qu’une crèche ? Un symbole religieux ? Une coutume culturelle et festive ? L’un excluant l’autre ou l’un s’additionnant à l’autre ? Un vilain piège, en fait. On imagine mal, à deux mois des fêtes de fin d’année, le Conseil d’Etat interdire purement et simplement les crèches dans les bâtiments publics (les mairies ou les conseils généraux, en l’occurrence) après avoir de facto, fin août, autorisé le port du burkini sur les plages en invalidant les arrêtés pris par quelques municipalités. On imagine le tollé que susciterait cette décision qui mettrait, comme si on en avait besoin, un peu plus d’huile sur le feu : des cris d’orfraie de tous les identitaires et de leurs affidés, des tweets rageurs de l’abbé Grosjean, une chronique vengeresse d’Eugénie Bastié, une homélie courroucée du très réactionnaire évêque de Bayonne, Marc Aillet, et peut-être même un défilé (maigrelet) de Civitas. On imagine aussi les politiques sommés, les uns après les autres, de prendre position pour ou contre l’âne et le bœuf. Pour se sortir de l’ornière, le Conseil d’Etat, très agité ces jours-ci par cette question, devra trouver une voie médiane, assortir l’autorisation de quelques interdictions. Pourtant, il n’échappe à personne que si la crèche a fait, l’hiver dernier, sa réapparition dans plusieurs bâtiments publics, ce n’était pas pour défier la loi de 1905 et la laïcité. N’en déplaise à la Fédération nationale de la libre pensée qui a porté le débat sur le terrain juridique. Mettons de côté des traditions bien établies comme celles de l’Alsace concordataire. Le message envoyé par ces maires était d’affirmer haut et fort les «racines chrétiennes» de la France. Non pour faire plaisir à quelques électeurs catholiques intransigeants. Mais pour faire pièce à «l’islamisation rampante» qu’ils redoutent et fantasment. Bref, le clash des civilisations à portée de santons. Voilà comment on prend en otages le droit et les débats de fond.

 

FranceTV Info 21/10 :

 

Quatre questions sur le retour du débat sur les crèches dans les lieux publics

Le rapporteur public du Conseil d’Etat a recommandé vendredi d’autoriser, sous conditions, l’installation de crèches de Noël dans les bâtiments administratifs, au nom du principe de laïcité

Vous aimez les débats sur la laïcité ? Celui sur les crèches dans les lieux publics revient à l’ordre du jour. A deux mois de Noël, le Conseil d’Etat est invité à se prononcer sur le dossier dans les semaines qui viennent. Le rapporteur public du Conseil d’Etat, dont l’avis est généralement suivi, a recommandé, vendredi 21 octobre, d’autoriser, sous conditions, l’installation de crèches de Noël dans les bâtiments administratifs, au nom du principe de laïcité.

Explications.

D’où vient cette polémique ?

L’Association des maires de France avait décidé fin 2014 d’élaborer un guide de “bonne conduite laïque” à destination des élus locaux. L’élaboration de ce fascicule avait été accélérée après les attentats de janvier 2015. En novembre 2015, rappelle Le Parisien, l’association avait publié un document préconisant notamment d’écarter les crèches des mairies ou les menus confessionnels des cantines.

Sans convaincre tout le monde. Xavier Bertrand, par exemple, s’y était opposé. “Quand j’entends aujourd’hui des préconisations, notamment de l’Association des maires de France, disant ‘On ne peut pas avoir de crèches dans les mairies’, s’il y en a déjà eu, je suis désolé, on les garde. Si nous commençons à vaciller aussi sur nos valeurs et sur nos traditions, ce pays est fichu.”

Pourquoi le Conseil d’Etat a-t-il été saisi ?

Le Conseil d’Etat, examinait vendredi deux affaires liées à l’installation de représentations de la scène de la nativité dans des lieux publics. Plus précisément, le dossier était présenté devant l'”assemblée du contentieux”, une formation de 17 juges présidée par le vice-président du Conseil d’Etat et chargée d’examiner les affaires “qui présentent une importance remarquable”.

Ces deux affaires avaient donné lieu à des décisions contradictoires de la justice. En octobre 2015, la cour d’appel de Nantes avait validé l’installation d’une crèche au conseil général de Vendée. Celle de Paris avait au contraire donné raison à l’association qui refusait l’installation d’une crèche à la mairie de Melun. En première instance, les décisions avaient été diamétralement opposées.

A l’origine de ces affaires, des plaintes d’associations de défense de la laïcité, affilées à la Fédération nationale de la libre pensée.

Que dit le rapporteur public ?

Pour le rapporteur public, “l’article 28 de la loi de 1905 et, surtout, le principe de neutralité dont la portée est plus grande (…) n’interdisent pas par principe l’installation d’un crèche sur le domaine public”, à moins qu’il ne s’agisse d’un “geste de reconnaissance d’un culte”.

A l’instar du burkini, autorisé sur les plages tant que l’ordre public n’est pas troublé, cette autorisation de principe doit être assorti de conditions strictes : que l’installation de la crèche s’inscrive “dans le temps festif lié à la célébration de Noël” ; qu’elle ne soit accompagnée d’aucune “initiative teintée de prosélytisme religieux” ; et qu’elle revête le “caractère d’une manifestation culturelle ou à tout le moins festive”.

Autrement dit, une crèche autour de laquelle on organiserait des prières serait à proscrire ; et mieux vaut exposer les santons “dans un lieu destiné à la circulation du public et apprêté pour Noël” qu'”entre le buste de Marianne et le drapeau tricolore”.

Le Conseil d’Etat doit se prononcer dans les prochaines semaines. Mais les avis du rapporteur public sont, en règle générale, suivis.

Comment justifie-t-il cette position ?

Le rapporteur public estime que si la crèche a longtemps revêtu un caractère religieux, elle a été “emportée” par le mouvement de sécularisation de la société consécutif à la Révolution française. A compter du XIXe siècle, elle “essaime” dans les foyers non catholiques pour devenir, comme les décorations de Noël, un “accessoire festif de célébration”. Au point qu’aujourd’hui, les santons connaissent des chiffres de vente bien supérieurs au nombre des chrétiens pratiquants…

Pour autant, “contrairement au sapin de Noël”, la crèche “porte encore en 2016 la trace perceptible de sa dimension religieuse”. “Nous ne croyons pas que ce contexte vous impose d’instruire par principe le procès de la crèche au risque, à vouloir trop traquer le religieux derrière la tradition festive ou le folklore, d’attiser des soupçons et des controverses qu’il vous appartient plutôt d’apaiser”, a conclu le rapporteur, appelant les juges à “privilégier la dimension pacificatrice de la laïcité”. Avant d’ajouter que la justice devra en revanche “censurer” sans état d’âme ses éventuelles “instrumentalisations”.

 

Le Figaro 22/10 :

 

 

 

Le FIGARO du 27 octobre

 

 

 

 

Le journal du pays Yonnais 22 octobre

 

 

blog de “familles chrétiennes”

 

avec ce lien

 

 

Sud-Ouest du 3 novembre

 

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Le Figaro du 4 novembre

 

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Ouest-France du 9 novembre

 

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L’Express du 9 novembre

 

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La Provence

 

Les crèches ont-elle droit de cité ?

A marseille, est-il licite d’installer une crèche de Noël dans un bâtiment public ?

pour le conseil d’Etat, seules les crèches représentant “un caractère culturel, artistque ou festif” sont autorisées dans les mairies.

Elle est brune, elle porte un chignon et elle arbore fièrement son écharpe tricolore. Bon sang! mais c’est Lisette Narducci qui trône à l’entrée de la grotte de la nativité, entre Joseph, Marie, l’âne et le boeuf! Comme chaque année, le santon de Madame le maire de secteur, offert par un célèbre saisonnier du Panier, va prendre sa place dans le hall de la mairie des 2e et 3e arrondissements. Une crèche de 4 mètres de long, qui met en scèneune trentaine de santons habillés : la vendeuse de poissons, le rémouleur, le berger, le meunier, dans la pure tradition provençale. nfin presque… Parce qu’à côté du santon de Lisette, il y a celui d’Alain Ottonello, le curé du Panier, représenté en soutane, façon Dom Camillo, par le même artisan du quartier! Et chaque année, c’est le père Ontonelle (le vrai) qui vient à la mairie pour bénir la crèche. Au nom du Père, du Fils et du St-Esprit. L’Eglise et la République qui crèchent ensemble. “Sans que cela ne choque personne”, commente Lisette Narducci. L’élue pour qui cette “crèche républicaine” est une tradition depuis vingt ans se dit “exaspérée par ces faux débats”. Est-il licite d’installer des crèches de Noël dans des bâtiments publics ? La polémique est pourtant remontée jusqu’au Conseil d’Etat. Certains défenseurs de la laïcité dénoncent des revendications électoralistes de certains élus “faiseurs de crèches” en quête d’lecteurs catholiques. Le 9 novembre dernier, après une bataille juridique alimentée par des décisions contradictoires, la plus haute juridiction administrative a tranché… A mois qu’elle n’ait  qu’ajouté de la confusion ! Le Conseil d’Etat a jugé que ce crèches sont légales, à condition de présenter “un caractère culturel, artistique ou festif”, mais illégale “si elle exprime la reconnaissance d’un culte ou une préférence religieuse”. Alos culturelles ou religieuses, les crèches innombrables installées dans des bâtiments publics en Provence ?

S. Ma

Lisette Narducci, maire PRG des 2e et 3e arrondissements

La crèche de Noël fait partie des traditions provençales .Elle contribue à cette période festive que tout le monde partage, quelles que soient les confessions. Ce moment contribue même au vivre-ensemble. Je vois des enfants ébahis, des gens qui font des photos.
Cette crèche, je la fais chaque anéne depuis vingt ans dans ma mairien à la plus grande joie des petits et des grands, des Marseillais et des touistes qui viennent nombreux la photographier. J’ai traversé la période débats, mais je ne me sui sjamais posé la question. Le 2 décembre prochain, elle sera inaugurée dans la plus pure tradition, avec le curé du Panier. On sèmera le blé de la Sainte-Barbe. Plusieurs centaines de personnes assisteront à cette fête. Chaque anée, on est tellement nombreux que tout le monde ne peut pas entre dans la salle !

Je n’ai pas attendu l’avis du Conseil d’Etat pour décider si je devais continuer cette tradition. La laïcité, c’est aussi le partage. On partage la crèche comme on “partage la bûche”, le sapin. Ces débats m’exaspèrent !

Cela fait partie des choses joyeuses, il n’y a aucune raison de s’en priver. Moi-même, je fais partie de cette crèche, avec un santon à mon effigie qui m’a été offert par un santonnier du Panier. Il a également fait celle du père Ottonello. La République et l’Eglise, cela ne choque personne. Une seule fois, l’an denrier, j’ai reçu un courrier d’un collectif de défense de la laïcité. J’ai répondu en quelques lignes, exactement ce que je viens de vous dire. Cela n’a pas été plus loin, au contraire, les gens me remercient.

 

Christian Eyschen, vice-président de la Libre Pensée

“La justice devra juger au cas par cas”.

Je précise d’avord que la libre pensée est la plus vieille association laïque de ce pays, elle date de 1847. Elle est à l’initiative de l’élaboration de la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l’Etat. les plus grands noms de la République en furent membres. Elle a donc une compétence certaine en matière de laïcité. L’affaire des crèches catholiques – les protestants ne font pas de crèches – dans les bâtiments de la République est récente et  ne correspond nullement à une tradition. Les crèches sur les emplacements publics ont été interdites par la révolution française, elle ont donc trouvé une nouvelle vie au domicile des particuliers .La crèche trouve son origine dans le paganisme et cette symbolique a été recylclée, comme beaucoup d’éléments païens dans le christianisme, puis au fil d utemps, la crèche s’est sécularisée, surtout en Provence, où par l’addition des personnages des santons de métiers. Le caractère central de la Nativité a été complètement édulcoré, coire occulté dans certains cas. Le Conseil d’Etat a été très net dans ces deux arrêts qyu vont maintenant s’imposer à toute la jurisprudence administrative : les crèche reproduisant une scène de la Nativité contenue dans le Nouveau Testament sont prohibées dans les bpatiments de la république. Pour les emplacements publics (c’est-à-dire ailleurs), la juridiction administrative devra juger au cas par cas si la crèche en question contient des éléments religieux ou pas et si elle s’appuie sur une tradition. La règle est désormais rappelée : la crèche catholique est interdite dans les bâtiments de la République, ailleurs son caractère doit être examiné au cas par cas. Nous sommes là dans la justice tout simplement. Le meurtre est interdit et entraîne une condamnation, mais certaines fois,ce n’est pas le cas (police, armée, gendarmerie, légitime défense, etc.)

C’est le tribunal, en entendant les différentes parties qui porte un jugement au cas par cas. Cela sera la même chose pour les crèches.

 

 

Marianne, le billet de Caroline Fourrest 22 déc au 5 janvier

 

Crèche d’Angoulême: l’invitation du maire à tous les passionnés de chocolat !

Le maire d’Angoulême a dû faire déplacer la crèche installée dans la mairie après intervention de La Libre Pensée de Charentes

 

article paru dans La Charente Libre