Conseil des Sages de la laïcité du Ministre Jean-Michel Blanquer : Derrière la paille des mots, le grain des choses : Une présidente antilaïque aux manettes

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Afin que chacun soit juge, la Libre Pensée publie la retranscription des propos de madame Dominique Schnapper qui préside le Comité des Sages, lors de l’émission sur France-Inter du 26 juin 2018. On y verra que la laïcité n’a aucun problème avec l’Eglise catholique, qu’il est judicieux de « réparer le lien entre l’Etat et l’Eglise », que si l’Eglise catholique a bien le droit d‘être contre le Mariage pour tous, cette faculté n’est pas donnée à tout le monde, surtout pas aux musulmans… Mais aussi, dans une certaine mesure aussi aux Juifs : « La citoyenneté des Juifs a toujours été une épreuve de la République ».

Au passage, on apprend que Nicolas Sarkozy et François Hollande, contrairement à Emmanuel Macron, n’avaient pas une vision transcendante de leur fonction et qu’il en faut une pour être  le Président ! Comme zèle flagorneur, on a rarement entendu  pire.

Son père, Raymond Aron n’était pas mal dans la Réaction, sa fille se surpasse quand elle appelle à une « nouvelle guerre à mener avec courage ». Il y a des gens toujours très courageux avec la dernière goutte du sang des autres. Le père, la fille et le saint-Esprit, sans doute…

EXTRAITS

France-Inter : Notre invitée du grand entretien ce matin est sociologue, Présidente du Conseil des Sages de la Laïcité installé par Jean-Michel Blanquer, ancienne membre du Conseil Constitutionnel. Bonjour, Dominique Schnapper.

Dominique Schnapper : Bonjour Nicolas Demorand.

Nicolas Demoran : Et merci d’être avec nous. Vos travaux, je les résume, porte à très très gros trait sur l’Etat, la nation, la citoyenneté qui fait qu’un pays existe et tient ensemble. Vous avez donc accepté de présider ce Conseil de la laïcité voulu par Jean-Michel Blanquer pour aider les enseignants aux prises avec cette question et les difficultés qu’elle pose en classe. On va y venir après, si vous le permettez, une étape au Vatican où se rend aujourd’hui le Président de la République pour rencontrer le pape et sans doute continuer à réparer ce lien abimé entre l’Eglise et l’Etat comme il l’avait dit devant les évêques de France. Quelle est selon vous la doctrine religieuse du Président ?

DS : Je n’en sais rien, c’est à lui de le dire. Nous constatons l’action qu’il a, mais ses convictions, sa doctrine politique, il ne l’a pas dit clairement. Cela dit, l’idée de réparer les liens avec l’Eglise catholique, il est là pour réparer les liens entre les différents groupes de la société, je ne vois là rien de choquant.

France-Inter : Quels qu’ils soient ?

DS : Non pas quels qu’ils soient. Il ne faut pas réparer les liens avec les gens qui veulent détruire la République. Mais réparer les liens avec ceux qui jouent le rôle de la République, qui jouent le jeu de la République, je ne vois là rien que de très normal pour un Président de la République.

France-Inter : Rétablir, réparer le lien abîmé entre l’Eglise et l’Etat, est-ce abimer la Laïcité ?

DS : Eh bien, il y a des problèmes d’atteintes à la Laïcité, mais pour dire la vérité, c’est rarement le cas… le fait des catholiques, il ne faut pas jouer avec un siècle de retard un combat qui a été gagné avec l’Eglise catholique qui dans sa majorité joue pleinement le jeu de la Laïcité. Alors bien sûr, il y a des extrémistes dans… il y a des extrémistes dans la Laïcité, il y a des extrémistes parmi les catholiques et nous n’avons de goût, en tout cas, je n’ai de goût ni pour les uns ni pour les autres. Mais je crois que fondamentalement, il n’y avait pas grande réparation à faire avec l’Eglise catholique.

France-Inter : Mais … tout ce que dit le Président de la République et tout ce qu’il a pu dire devant les évêques de France vous semble marqué, en tout cas on l’entend, d’une très grande sérénité, rien de nouveau sous le soleil ?

DS : Sur le fond, il n’y a pas grand-chose de nouveau sous le soleil. Personnellement, j’aurais aimé qu’il rappelle peut-être qu’il y avait deux France, il y a la tradition chrétienne qui est à l’origine de la France, c’est un fait, mais il y a aussi la tradition des Lumières. Peut-être aurait-il pu rappeler qu’il y a aussi la tradition des Lumières dans la tradition française. Mais il était aux Bernardins, qui est un lieu très ouvert du catholicisme fondé par Monseigneur Lustiger et où se déroulent beaucoup de rencontres d’intellectuels très ouvertes. Donc, il a insisté sur cette dimension.

France-Inter : Dominique Schnapper, quel bilan d’étape faites-vous de vos travaux à l’Education nationale dans ce Conseil des Sages ? La Laïcité à l’Ecole, qui est un principe, n’est-elle pas redevenue un combat ?

DS : Il y a effectivement de gros pro… enfin, dans un certain nombre d’établissements, des problèmes d’application de la Laïcité. Le Conseil des Sages n’a évidemment pas pour mission de repenser la Laïcité sur laquelle, vous le savez, il existe des bibliothèques entières, et à laquelle (auxquelles) d’ailleurs beaucoup des membres du Conseil ont d’ailleurs participé dans leurs travaux ou dans leur action politique. Donc, le Conseil est là à la fois pour symboliser l’engagement du Ministre qui est très net et très clair et en même temps pour aider surtout un certain nombre d’enseignants, parmi les plus jeunes qui sont en face d’élèves et qui eux-mêmes n’ont plus une grande conscience de ce qu’est la Laïcité. Donc nous sommes là pour rappeler les principes extrêmement simples : que c’est un principe de Liberté, que c’est un principe de respect des religions qui ne s’attaque pas aux religions, mais qui permet quand même à chacune d’entre elles de s’appliquer, qu’il y a une distinction entre l’espace public et celui de la neutralité. Et à aider tout le monde à penser clair et à essayer d’agir en fonction de ces principes.

France-Inter : Quel type de problèmes ou de situations tendues vous remontent de ces établissements scolaires?

DS : Pour l’instant, le Conseil fonctionne très régulièrement et, je crois, avec une certaine confiance entre les différents membres de ce Conseil,  donc cela se déroule bien. On a aidé à la rédaction d’un Vademecum de la Laïcité. Parce que la Charte de la Laïcité, qui était parfaite sur le fonds, était très abstraite et très théorique et elle ne répondait pas directement aux problèmes qui se posaient aux enseignants. Et nous savons que dans un certain nombre de lycées, enfin d’établissements scolaires, pas des lycées, mais d’établissements scolaires en général, il y a des problèmes pour traiter d’un certain nombre de faits historiques qui sont au programme, qui doivent être traités.

France-Inter : Par exemple ?

DS : Il est difficile de parler de la Shoah, il est difficile de parler des problèmes du Moyen-Orient en Histoire. Il y a quelquefois le refus d’aborder un certain nombre d’auteurs de la littérature française, il y a là toute une série de problèmes.

France-Inter : Quels auteurs de la littérature française ?

DS : Par exemple Voltaire. Autour du problème de l’antisémitisme, de la colonisation, ces problèmes chauds sont quelquefois difficiles à traiter.

France-Inter : C’est étonnant, ce sont des sujets historiques qui sont « rabattus » sur la Laïcité. Normalement cela faisait l’objet de discussion en cours.

DS : Cela allait de soi.

France-Inter : Oui l’enseignement de faits historiques. Aujourd’hui c’est un combat intellectuel et culturel.

DS : Oui, c’est-à-dire que ce qui est frappant, c’est que pour notre génération ce qui allait de soi, ce qui ne se discutait pas, cette séparation du politique et du religieux, dont la Laïcité « à la française » n’est qu’une forme particulière, et les principes allaient de soi, donc on n’avait pas à les formuler, on les pratiquait directement et naturellement. Aujourd’hui, cela n’est plus le cas et donc il faut les rappeler et il faut essayer de soutenir les enseignants et les chefs d’établissements qui sont face à des problèmes nouveaux qui ne se posaient pas autrefois. Cela dit, les grands principes doivent toujours être repensés en fonction des problèmes nouveaux qui se posent dans la société.

 

Le Conseil des Sages mis en place par le ministre Blanquer

France-Inter : Dominique Schnapper, apprendre et chanter la Marseillaise, le Conseil national des Programmes en fait une priorité de la rentrée 2018, excusez la formulation mais la Marseillaise est une Arlésienne dans les programmes scolaires. Elle y vient, elle part, elle revient, mais est-ce une bonne mesure, là maintenant en 2018 selon vous ?

DS : – Ecoutez, la Commission des Programmes me parait animée de beaucoup de bon sens, donc a priori ils ont réfléchi sur la question, je pense que c’est… enfin, je n’ai aucune objection, même si je ne suis pas tout à fait sûre que cela résolve tous les problèmes qui se posent. Mais le drapeau, le chant, la langue, tout cela ça fait partie de notre héritage.

France-Inter : S’ouvre aujourd’hui le procès d’une agression antisémite immonde qui a eu lieu à Créteil en 2014. Depuis, il y en a eu d’autres, tant d’autres, beaucoup d’autres, de quoi ces agressions sont-elles le symptôme selon vous,  Dominique Schnapper ?

DS : Outre les sentiments personnels que l’on peut avoir sur la question, je pense que c’est un signe très inquiétant. Parce que les crises d’antisémitisme ont toujours été des crises de la démocratie. La citoyenneté des Juifs a toujours été une épreuve de la République et quand elle n’est pas fidèle à ses propres principes, c’est-à-dire quand elle n’assure pas le respect des Juifs au même titre que tous les citoyens, c’est toujours inquiétant pour son propre destin.

France-Inter : Cette analyse vous pensez qu’elle fait consensus et qu’elle est partagée par tout le monde ?

DS : Je ne sais pas, c’est la mienne en tout cas.

France-Inter : C’est étonnant de se dire qu’elle ne l’est peut-être pas.

DS : Si elle ne l’est pas, c’est un petit peu inquiétant. Cela dit, les gouvernements successifs ont toujours dit que ce n’est pas un problème des Juifs, c’est un problème de la République. On l’a beaucoup entendu, je pense que c’est vrai et que c’est juste et que nos gouvernants en ont pour l’instant fortement le sentiment.

France-Inter : Le terrorisme djihadiste a frappé la France avec une rare violence ces dernières années. Un groupuscule (je ne compare pas les choses et je ne dis pas qu’elles sont de même intensité bien entendu), mais un groupuscule d’extrême-droite a été démantelé hier qui aurait eu la volonté de commettre des attentats anti-musulmans, il faut appeler les choses par leur nom, est-ce que la société française est en train de se fracturer ou quelque chose la tient encore unie ?

DS : Je pense que la société française comme les sociétés européennes, démocratiques européennes sont en ce moment menacées par un certain délitement. Et dans la mesure où, en France, nous avons la population musulmane la plus importante et où nous avons des débats idéologiques autour de ce problème, il y a certainement une action non seulement nationale, mais internationale qui vise à déstabiliser particulièrement la France. C’est aussi le cas de la Belgique. Et donc il faut que les démocrates aient la volonté de défendre leurs propres valeurs.

France-Inter : Ils sont faibles en ce moment, ou pas ?

DS : Les démocrates ont tendance à être, ne pas être très courageux, ne pas être très… Cela fait partie de leurs qualités, c’est-à-dire qu’ils ne veulent pas faire la guerre, ils n’aiment pas faire la guerre, ils ne la font que s’ils sont forcés de la faire, mais il y a des moments où il faut savoir lutter pour défendre ses propres valeurs.

Léa Salamé : Dominique Schapper, c’est intéressant ce que vous dites, quand vous dites que votre but au Conseil c’est d’aider les jeunes enseignants qui ont de la difficulté dans leur classe et de leur rappeler les grands principes. Mais au-delà je voudrais savoir, au-delà des grands principes, du vademecum, qu’est-ce que vous dites à un enseignant qui a face à lui des élèves qui lui disent : « Je ne veux pas étudier la Shoah » ou « non, la Terre n’est pas ronde » ? Qu’est-ce que vous lui dites de faire, quel conseil vous lui donnez au-delà des grands principes ?

DS : Le Vademecum s’efforce de ne pas se contenter des grands principes, puisque justement, ils ont déjà été formulés par des textes précédents que nous adoptons tous et sur lesquels nous sommes unanimes à trouver qu’ils sont excellents.

France-Inter : Alors qu’est-ce que vous lui dites à cet enseignant ?

DS : On lui dit que c’est très difficile et qu’on reconnaît pleinement ses difficultés. Et on essaye au moins que l’Institution le soutienne. Et qu’il se sente soutenu si il veut appliquer ces principes, c’est-à-dire penser qu’il n’y a pas de tabou dans l’ordre de la connaissance, que la connaissance ce n’est pas la croyance, qu’il y a là une distinction essentielle et que le monde de l’enseignement est fait pour transmettre la connaissance et non pas les croyances.

France-Inter : Laissez-moi repréciser : si vous vous étiez face à ces élèves, qui vous disent : « je ne veux pas parler de la Shoah » ou « je ne veux pas qu’on étudie Voltaire parce que c’est un hérétique » ou je ne sais quoi d’autre, qu’est-ce que vous leur dites pour les faire changer d’avis ? C’est très compliqué.

DS : C’est très difficile. Mais nous ne sous-estimons pas les difficultés. Nous avons reçu un professeur d’Histoire de la Seine-st-Denis qui nous a fait un récit admirable de son expérience qui consistait à expliquer, réexpliquer, prendre beaucoup de temps, reconnaître les difficultés, reconnaître les difficultés de ces élèves et qui disait que, à force de travail, de conviction, et d’empathie avec leurs problèmes, il arrivait à parler à peu près de tous les sujets. Mais nous ne sous-estimons pas une seconde la difficulté de la tâche.

France-Inter : Dominique Schnapper, une question à l’observatrice de la vie politique que vous êtes : la verticalité du pouvoir instaurée par Emmanuel Macron, son évocation fréquente de la transcendance, est-ce que ça vous semble aller dans le bon sens ?

DS : Oui. Oui, je pense que les français, devant deux Présidents de la République qui, dans des styles différents, jouaient aux hommes normaux, ne répondaient pas à une des aspirations en tout cas des français. Une de leurs aspirations, parce que leurs aspirations sont contradictoires, – comme les nôtres personnellement, elles sont toujours contradictoires -, mais une des aspirations c’est qu’il y avait une certaine dignité du rôle de Président de la République.

France-Inter : Et vous avez l’impression qu’Emmanuel Macron l’incarne à nouveau ?

DS : Oui, il souhaite l’incarner et je pense qu’il l’incarne plutôt.

France-Inter : Et dans son langage ? Quand il parle parfois de manière un peu « vulgaire » au sens premier du terme ? Quand il s’exprime avec des français en employant des mots comme : « On ne va pas mettre le bordel » etc, Est-ce que là aussi il est vertical ?

DS : Proust a dit des choses définitives sur l’utilisation à certains moments des mots dits vulgaires. Je ne sais pas s’il le fait consciemment, mais en tout cas il le fait très bien.

Nicolas Demorand : C’est une citation de Proust, en fait !

DS : Non, c’est une analyse de Proust de l’utilisation de certains termes.

Léa Salamé : Beaucoup de choses ont été dites déjà sur Simone Veil depuis son décès et même avant, mais pour vous, qu’est-ce qui rentre au Panthéon avec et à travers Simone Veil ?

DS : Simone Veil est une belle personnalité, nous le savons par son courage, son authenticité et ses convictions, mais il y a une chose pour laquelle je l’admire profondément : c’est que déportée à l’âge de 16 ans, à son retour, elle a engagé ses convictions et sa vie politique et son action pour la réconciliation avec l’Allemagne et la construction européenne. Et cela, je trouve ça admirable. Pour le reste, j’avais à la fois de l’affection et de l’admiration, mais je trouve que c’est là où elle a marqué quelque chose d’admirable et qui est bien récompensé par son entrée au Panthéon.

France-Inter : Bonjour Lucie.

Lucie : bonjour à tous, merci pour votre émission. Je voulais demander à votre invitée comment elle pouvait affirmer que le catholicisme joue le jeu de la Laïcité alors qu’elle a organisé, à l’époque des débats sur le mariage des personnes de même sexe, la venue de milliers de personnes à Paris, qu’elle a affrété des bus, qu’elle en a parlé tous les dimanches à la messe, cela me fait bondir d’entendre une chose pareille.

France-Inter : Lucie, elle, c’est l’Eglise, ce n’est pas Dominique Schnapper.

France-Inter : Dites-nous sur ce combat-là qui était un combat politique.

DS : C’était un combat politique. L’Eglise catholique a le droit d’avoir certaines positions au même titre que tous les autres citoyens. Nous partageons notre… cette conviction, ou nous ne la partageons pas, c’est notre affaire, mais je ne vois pas au nom de quoi les catholiques n’exprimeraient pas leur refus du mariage pour tous.

François : Bonjour, Mme Schnapper, bonjour Nicolas. J’avoue que je ne comprends pas pourquoi il n’y a pas au collège, à égalité avec l’enseignement des faits religieux, des grands monothéismes, que j’approuve pleinement, pourquoi il n’y a pas d’enseignement du fait athée et agnostique. Je suis grand-père d’une petite fille qui passe de 6e en 5e. J’ai regardé avec intérêt ce qui était dit dans les manuels justement sur les grands monothéismes. Je ne vois pas pourquoi aucune place n’est faite à la pensée athée et agnostique, alors que le rapport de Régis Debray de 2002 et notre tradition laïque implique de mettre au même niveau ceux qui « croient au ciel » comme on dit familièrement et ceux qui n’y croient pas.

DS : Oui, je crois que la Commission des programmes veut réfléchir en effet au contenu des manuels s’agissant des monothéismes et aussi de la pensée agnostique. Cela dit, la pensée agnostique est exposée dans l’histoire de la littérature française dans laquelle elle a une grande tradition. Je ne crois pas qu’elle soit évacuée par les philosophes, en classe de philosophie. Je ne crois pas qu’elle soit évacuée à aucun niveau. Mais il est vrai que se pose un problème sur les manuels et la Présidente du Comité des programmes a relevé des inexactitudes sur tous ces problèmes qui se répercutent dans l’enseignement et qu’il s’agit de reprendre simplement pour présenter des faits historiques qui soient exacts et d’autre part, pour étendre éventuellement au-delà des monothéismes, à une réflexion sur l’ensemble de ce qu’on appelle les faits religieux.

France-Inter : Beaucoup de questions venues d’enseignants, beaucoup de questions venues du monde scolaire. Anne-Laure a un exemple personnel : fête de l’Aïd le même soir que la fête de l’école, on a beaucoup été interpellé sur le sujet, on a souvent été obligé de rappeler que c’était une école publique et que nous ne tenions pas compte des fêtes religieuses, surtout quand les dates sont posées en début d’année scolaire. Alors Mme la Présidente, que faire ? Et je donne la parole à Isabelle également, bonjour et bienvenue.

Isabelle : Je vous remercie de prendre ma question. Les débats sont très intéressants et y compris les questions des auditeurs. Je suis moi-même enseignante et je regrette que votre invitée n’ait pas finalement répondu à la question de Mme Salamé. Parce que c’est très bien de partager cette expérience d’un professeur qui, à force de temps, réussit à établir un lien. Mais il faut bien se rendre compte que les refus ne sont pas des refus d’aborder certaines questions, ce ne sont pas des refus constructifs qui souhaitent échanger, ce sont des refus très souvent violents et pour un professeur il faut une solution.

France-Inter : Vous l’avez vécu vous-même cette violence ? A quoi faites-vous référence ?

Isabelle : Oui bien sûr, ce sont des avis tranchés : « c’est faux », « c’est nous ». Moi-même, très honnêtement, je n’ai jamais vécu de situations d’insultes, mais pour certains collègues ça peut arriver.

France-Inter : Merci Isabelle pour cette question et ce témoignage. Dominique Schnapper ?

DS : Oui, nous savons que ces problèmes existent et nous n’avons pas de moyens miraculeux pour résoudre les problèmes, quand ils se posent de cette façon-là. Tout ce qu’on peut dire, c’est que le ministre de l’Education nationale ne veut pas qu’on continue comme cela à mettre la poussière sous le tapis, que les enseignants soient soutenus par leur Institution et qu’on les aide.

France-Inter : On sent leur solitude. Seul au front, on a l’impression.

DS : Oui, ils avaient le sentiment qu’ils n’étaient pas appuyés dans leur combat et nous avons ce rôle de recueillir tous ces éléments, d’essayer de soutenir les enseignants et de leur montrer que l’on s’efforce de les aider et on recueille toutes ces atteintes, tous ces épisodes. Je voudrais dire un mot sur les fêtes que la première intervenante a soulevé, Anne-Laure. Oui, la fête de l’école prime les fêtes religieuses. C’est une règle de la Laïcité. Depuis toujours il y a eu ce problème. Longtemps, il y a eu le problème des concours le samedi et  la position est je crois très claire. Dans la mesure où c’est possible, on peut tenir compte des fêtes et on essaye de le faire. Mais dans la mesure où ça n’est pas possible, où il y a conflit entre les deux, il est clair que la fête de l’école, la fête laïque prime la fête religieuse comme la loi républicaine prime la loi religieuse.

France-Inter : Mme la Présidente du Conseil des Sages de la Laïcité, merci d’avoir été au micro de France-Inter ce matin.

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Une toute autre voie de défense de la laïcité : l’action d’un Elu municipal à Hénin-Beaumont

Déclaration de David Noël, Conseiller municipal du PCF

Monsieur Briois,

Avec cette délibération, il s’agit de voter pour subventionner le fonctionnement des écoles privées sous contrat d’Hénin-Beaumont, les écoles Saint Louis et Sainte Jeanne d’Arc.

La loi Debré du 31 décembre 1959 oblige les collectivités à financer l’enseignement privé, via des subventions de fonctionnement aux écoles, au motif que les établissements privés concourent au service public d’éducation. Actuellement, les 8 200 établissements privés confessionnels sous contrat accueillent 17 % des effectifs scolarisés, soit deux millions d’élèves.

Chaque année, ce sont neuf milliards d’euros d’argent public qui sont versés aux établissements privés confessionnels sous contrat ; l’Etat verse plus de sept milliards d’euros pour les salaires des enseignants et les communes dépensent chaque année 500 millions d’euros. La subvention en question pour les écoles Saint-Louis et Sainte-Jeanne d’Arc en fait partie.

La loi impose certes à notre commune de financer le fonctionnement des écoles privées et nous ne faisons que respecter la loi, mais je considère, avec la Libre Pensée et d’autres associations attachées à la laïcité que la loi Debré de 1959 et les suivantes instituent une entorse à la loi de Séparation des Eglises et de l’Etat de 1905. Attaché à la laïcité, je suis favorable à l’abrogation de la loi Debré en vertu du principe « pas d’argent public pour l’école privée ».

Je ne voudrais pas que l’on puisse caricaturer mes propos. Je respecte les convictions religieuses des parents qui préfèrent scolariser leurs enfants dans l’enseignement privé et je respecte l’engagement et le dévouement des croyants qui sont nombreux à œuvrer dans des associations caritatives et de solidarité, mais je tiens à la stricte séparation des Eglises et de l’Etat, dans l’esprit de la loi de 1905, qui est d’abord et avant tout une loi de liberté.

Je m’abstiendrai donc sur cette délibération.