Irlande : abrogation du délit de blasphème

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Après les victoires obtenues sur le droit au divorce, le mariage pour tous, le droit à l‘IVG, le «délit de blasphème» est abrogé : En Irlande, un nouveau pas vers la Séparation des Églises et de l’État

Par referendum, le vendredi 26 octobre 2018 et par 64,85 % des voix, les électeurs irlandais ont fait disparaître l’article 40.6.1 de la loi fondamentale qui punissait de 25 000 euros d’amende tout outrage fait à la religion.

La criminalisation du blasphème avait été introduite en 1937 dans la Constitution de l’Etat Libre d’Irlande, à une époque où l’Eglise catholique tenait  les rênes de l’Etat tout juste né après la Guerre d’Indépendance contre la colonisation britannique.

«Le fait de rendre public ou de proférer tout propos blasphématoire, séditieux ou indécent est un délit punissable selon la loi», disposait le texte. Lourd symbole de l’emprise étouffante du clergé catholique, l’article en question reprenait les dispositions réprimant le «blasphème» en vigueur sous différentes formes depuis des siècles, et dont les dernières poursuites diligentées pour ce chef dataient de 1855.

En novembre 2012, à l’initiative du Bureau Européen de coordination de la Libre Pensée (BECLP), 55 associations laïques, humanistes, athées et de Libre Pensée de toute l’Europe s’étaient publiquement adressées à l’Union Européenne. Cette dernière,  par l’intermédiaire de sa Haute représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité,  Mme Ashton, avait décidé de signer un communiqué avec l’Organisation de la Conférence Islamique, le secrétaire général de la Ligue des Etats arabes et le Président de la Commission de l’Union africaine, communiqué qui disait :

“Nous croyons en l’importance de respecter tous les prophètes, quelle que soit la religion à laquelle ils appartiennent.”

Nous déclarions alors : «Cette position ne peut que faciliter les atteintes à la liberté d’expression et le renforcement de la répression, elle met en danger, et pas seulement en Europe, toutes les législations séculières ou laïques, organisant ou protégeant la liberté de conscience, de presse et création. Elle constitue un danger pour les libertés et la sécurité physique de tout un chacun, car c’est la porte ouverte à un arbitraire total. Les organisations, soussignées, demandent le retrait de cette déclaration, elles exigent la cessation des poursuites contre toutes les personnes inquiétées au titre du très réactionnaire «délit de blasphème».

Parmi les 55 associations signataires, on compte nos amis d’Atheist Ireland, en première ligne  face  à l’ingérence du clergé dans la société.

Ainsi, en 2015, la police irlandaise ouvrait une enquête, sur plainte d’un téléspectateur, à la suite des propos de l’acteur et réalisateur britannique Stephen Fry sur RTE, la télévision publique irlandaise, qui s’était demandé «pourquoi il respecterait un Dieu capricieux, mesquin et stupide»

En un nouveau signe de rupture avec la domination de l’Eglise catholique, les Irlandais ont massivement approuvé par référendum, le 26 octobre 2018, l’abrogation de la disposition de leur Constitution faisant du  prétendu blasphème un délit.

Avec l’Association Internationale de la Libre Pensée dont elle est membre, avec toutes les associations laïques, humanistes, athées qui le souhaitent, la Fédération Nationale de la Libre Pensée entend ne ménager aucun effort pour aider à ce que soient balayés les derniers vestiges de l’Ordre ancien par la plus stricte Séparation des Eglises et de l’Etat, garantissant la plus absolue liberté de conscience, seule voie pour une Irlande libre et unie.

C’est un formidable point d’appui après la condamnation à mort d’Asia Bibi pour « blasphème » pour avoir bu de l’eau à un puits réservé aux musulmans. La Cour suprême du Pakistan l’a acquittée.  Cette décision doit être respectée pour sauver la vie à Asia Bibi, menacée par une législation moyenâgeuse.

Paris, le 2 Novembre 2018