Crèche de Noël au siège de la Région : M. Laurent Wauquiez sanctionné en appel

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Le 25 juin 2019, la Cour administrative d’appel (CAA) de Lyon a rejeté le recours introduit par le Président du Conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes, M. Laurent Wauquiez, contre le jugement du 5 octobre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Lyon avait annulé, à la demande de la Libre Pensée, sa décision d’installer une crèche de Noël dans les locaux du siège de la Région, en décembre 2016.

Après avoir vainement soutenu que le jugement aurait été irrégulier dans la forme et sans fondement sur le fond en raison du retrait de la crèche litigieuse le 6 janvier 2017, M. Laurent Wauquiez a tenté, sans succès, de démontrer que celle-ci n’était pas de nature religieuse, mais présentait un caractère « culturel, artistique ou festif », conformément à la jurisprudence dégagée par le Conseil d’État dans deux arrêts d’assemblée du 9 novembre 2016 (voir CE, 9 novembre 2016, Fédération de Seine-et-Marne de la Libre Pensée, n° 395 122 et CE, 9 novembre 2016, Fédération de Vendée de la Libre Pensée, n° 395 223).

Sur le deuxième moyen, la CAA a considéré que « la désinstallation de l’œuvre le 6 janvier 2017, qui n’a pas été prise en vue de donner satisfaction à la Fédération de la libre pensée et d’action sociale du Rhône, n’a ni pour objet ni pour effet de retirer la décision de procéder à son installation »

S’agissant du troisième moyen, le juge d’appel écrit : « L’installation de cette crèche dans l’enceinte de ce bâtiment public, siège d’une collectivité publique, ne résultait d’aucun usage local et il n’est pas établi que cette pratique se rattacherait à une tradition régionale. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que l’objectif poursuivi par la région aurait été d’organiser une exposition, en dépit de la présence, à proximité de la crèche, d’un panneau se référant au savoir-faire des artisans santonniers locaux qui l’ont réalisée. Si l’installation ne se limite pas à la scène de la nativité et comporte un décor plus large, intégrant un village médiéval ainsi qu’une partie boisée, il ne fait pas de doute qu’elle a pour objet de figurer une crèche et la vocation artistique et pédagogique apparaît secondaire par rapport à la symbolique religieuse.

Enfin, la présence d’un sapin et de boules de Noël à proximité immédiate de la crèche ne suffit pas à inscrire celle-ci dans un ensemble de décorations festives de nature à lui ôter sa connotation religieuse. Il s’ensuit que le fait d’avoir procédé à cette installation dans l’enceinte de l’hôtel de région, en l’absence de circonstances particulières permettant de lui reconnaître un caractère culturel, artistique ou festif, méconnaît l’article 28 de la loi du 9 décembre 1905 et les exigences attachées au principe de neutralité des personnes publiques. »

L’arrêt du 25 juin 2019 de la CAA de Lyon précise donc nettement que le démontage à la date prévue par la collectivité d’une crèche religieuse installée dans un bâtiment public ne saurait répondre à une demande antérieure tendant au retrait immédiat de la décision d’installation. Par ailleurs, le décor dans lequel s’inscrit la crèche de Noël ainsi que la mention éventuelle de ses artisans créateurs ne suffisent pas à effacer le caractère religieux de ce symbole ni à couvrir, au regard de l’article 28 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État, l’illégalité de sa présence dans un bâtiment public.

M. Laurent Wauquiez, le clérical de l’étape du Puy-en-Velay, le chantre « des racines chrétiennes de l’Europe »(1) traverse une mauvaise passe : ses électeurs ont tourné le dos à son discours inspiré du dogme romain lors du dernier scrutin européen et le juge administratif vient de lui rappeler que la République française est laïque. Cette leçon devrait conduire beaucoup d’autres responsables politiques à s’en tenir à cette sage formule :

Ne touchez pas à la loi de 1905 !

1. M. Laurent Wauquiez :« Que l’Europe ait des racines chrétiennes, que le mouvement de christianisation ait joué un rôle majeur dans la construction européenne, qui peut contester ça ? », 2011.