Projet de loi sur « Le séparatisme » Deux pas en avant, un pas en arrière !

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Entre Réaction et contradictions

C’est un projet de loi pour conforter les principes réactionnaires du Régime de Vichy et de la loi Debré que le gouvernement a adopté en Conseil des Ministres le 9 décembre. Entre deux pincées d’eau bénite pour Valéry Giscard d’Estaing, baptisé « Chevalier de la modernité » macronienne et la réaffirmation de principes antilaïques, le gouvernement a été contraint cependant de reculer partiellement.

Avec la mobilisation des associations authentiquement laïques (à l’initiative de la Libre Pensée, de la Ligue de l’Enseignement et de la Ligue des Droits de l’Homme), le rejet partiel du Conseil d’État, l’opposition croissante des cultes, notamment des protestants, la moue dubitative de l’épiscopat catholique, et les tensions de rejet au sein des associations musulmanes ; le gouvernement a maintenu un certain nombre de mesures phares annoncées, mais a été contraint de revoir largement sa copie.

On est plus sur le repli à Médine qu’à la conquête de la Mecque

Contrairement aux affirmations des médias, les termes « séparatisme » et « Islamisme », présentés comme le danger principal, sont bien repris dans l’exposé des motifs. L’idéologie d’État est réaffirmée en indiquant « La République demande une adhésion de tous », en clair : tous derrière Emmanuel Macron en rang par deux. Or, la grandeur de la République est d’’admettre en son sein, même ceux qui ne partagent pas ses « valeurs ».

Malheur à qui ne regarderait pas la ligne bleue des Vosges et du Touquet. La répression, le fichage, les menaces de dissolution, la Police des Cultes sont renforcées. L’Article 18 engage une interdiction pénale de divulguer des informations sur les personnes (notamment détenant une parcelle d‘autorité publique).   La notion de malveillance ne va pas être simple à mettre en œuvre. C’est la reprise pure et simple de l’Article 24 de la loi « Sécurité globale », contestée partout et par tout le monde. Pour les propos tenus sur internet, cela sera la comparution immédiate devant les tribunaux (Article 19).

Le principe de dissolution des associations et de fermeture administrative des lieux de culte sera imposé en cas de propos et d ‘agissements de membres d’associations en vertu de l’Article L.227-1 du Code de Sécurité intérieure. C’est le passage de la responsabilité individuelle à la responsabilité collective. Tous complices, tous coupables ! L’Article 43 interdit de diriger une association cultuelle en cas de condamnation pour terrorisme, discrimination, violence. En cas d’urgence, à titre conservatoire, la suspension des activités des associations et groupement de fait pourra être prononcée.

Il y aura aussi un contrôle accru sur les finances et un contrôle systématique sur les associations délivrant des reçus fiscaux. Tous contrôlés ! L’Article 3 prévoit l’intensification du fichage des personnes.

La fin des Chartes de la laïcité

Il est indiqué : « Il ne sera pas exigé des associations d’appliquer le principe de laïcité “au-delà de l’administration et des services publics” ». L’exigence antidémocratique imposée aux associations de promouvoir la laïcité par des chartes contraintes a disparu du projet de loi. A sa place, il y aura un socle « minimum » de principes à mettre en œuvre, dont le caractère limitatif a été imposé par le Conseil d’État : liberté, égalité (Hommes/Femmes), fraternité, dignité de la personne humaine. Mais aussi de « sauvegarder l’ordre public ». Les associations deviendraient alors des subsidiaires de l’ordre public. A chacun sa matraque ?

La décision d’imposer la signature de « Chartes de la laïcité » est renvoyée aux calendes grecques, beaucoup devront mettre leurs projets à la poubelle. Si les délégataires du service public devront, comme maintenant respecter le principe de neutralité, ce principe sera étendu « pour les commandes publiques ». Ce qui est une violation de l’article L.1121-1 du Code du Travail : « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché. »

Le gouvernement a dû céder sur l’interdiction de l’enseignement à domicile, sur la mise sous tutelle des Collectivités territoriales (le Préfet ne pourra que saisir le Tribunal administratif et non gérer à la place), la loi sur la presse ne sera pas modifiée.

Le gouvernement renonce à la labellisation des associations cultuelles. Il n’y aura qu’une non-opposition à la déclaration de nouvelles associations cultuelles, valable pour 5 ans. Il en faut aussi un peu pour les laïques. Ainsi l’Article 47 prévoit « de faire évoluer le droit des cultes en Outre-Mer afin de tendre, dans certains territoires, vers une harmonisation avec le droit commun applicable en métropole. » Ne sont pas prévu l’Alsace-Moselle, la Guyane, Mayotte, Wallis et Futuna. Encore un effort pour être laïque !

J’ai deux amours : Vichy et Debré

Si les écoles hors contrat pourront être fermées, cela ne sera pas le cas des écoles sous contrat. Les principes de la loi Debré sont réaffirmés, les dispositions du 25 décembre 1942 du Régime de Vichy sont maintenues.

Le projet de loi renforce les dispositions du Régime de Vichy en matière de dons et de legs pour les associations cultuelles. L’Article 28 prévoit (alors que c’est formellement interdit aujourd’hui par la loi de 1905) que les associations cultuelles pourront avoir des immeubles de rapport, en tirer des bénéfices et les distribuer à qui elles veulent. C’est le principe de non-financement qui est bafoué. L’État n’a pas à se préoccuper des finances des religions, ni dans un sens, ni dans l’autre. C’est la carotte financière pour acheter le silence complice et fructueux des religions à ce projet liberticide. C’est aussi la reprise de l’Article 38 de la loi dite « de confiance » retoqué par le Parlement naguère.

Pour séduire les religions, l’activité cultuelle pourra être menée dans le cadre de la loi du 30 juin 1881 sur la liberté de réunion, par la loi de 1901, et par la loi de 1905. Du culte (surtout catholique) : partout et en tous lieux.

Ce projet est réactionnaire, il faut le rejeter !

La Libre Pensée se déclare prête à toute mobilisation unitaire et réelle pour faire échec à ce projet de loi.

Ne touchez pas à la loi de 1905 !

Paris, le 10 décembre 2020

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