Interview du député Julien Dive, sur la question de la réhabilitation des Fusillés pour l’exemple de la guerre de 14-18.

Pour nous suivre

La Libre Pensée : Pouvez-vous vous présenter ?

Julien Dive, député de la 2e circonscription de l’Aisne.

Julien Dive : Je suis député de la 2e circonscription de l’Aisne. J’ai 37 ans et je suis père de deux enfants. Ancien maire d’Itancourt, dont je suis encore conseiller municipal, j’ai travaillé dans l’industrie automobile ; j’ai fait des études pour devenir officier dans l’armée ; puis j’ai arrêté et j’ai poursuivi dans la vie professionnelle. Je fais partie de la réserve citoyenne.

LP : D’où vient votre intérêt pour les Fusillés pour l’exemple de la guerre de 1914-1918 ?

JD : Je suis passionné par l’histoire. Je le dois en partie à ma grand-mère qui a vécu la seconde guerre mondiale et qui se souvient d’avoir joué au milieu des tranchées dans les bois ; elle m’a raconté l’exode de 1940 d’où mon intérêt pour l’histoire. Habiter le département de l’Aisne intervient aussi beaucoup dans mon intérêt pour le premier conflit mondial, et son contexte.

Le regard évolue au fur et à mesure que l’on vieillit ; le premier conflit est particulier : intéressé par le mouvement des troupes j’ai découvert les décisions folles et meurtrières qui ont été prises par le général anglais Haig, mais aussi par Nivelle au Chemin des Dames. Je vois comment la vie d’aujourd’hui puise ses racines, par exemple dans les mouvements sociaux comme les révoltes et les mutineries. On s’intéresse à tous les domaines ; par exemple, mon arrière-grand-père a combattu à Verdun puis a été fait prisonnier et il a été de nouveau mobilisé en 1940.

Je suis persuadé que les difficultés du département aujourd’hui trouvent leurs racines dans la guerre de 1914. Les gens sont partis et il ne restait rien au retour ; les châteaux, qui étaient nombreux dans l’Aisne, ont été détruits parfois volontairement comme à Coucy-le-Château et la basilique de Saint-Quentin a été minée (on peut en voir les traces aujourd’hui).

Le département a subi 90 à 95% de destructions : les champs inexploitables ; les fermes sans fermiers (d’où la venue de Hollandais) ; une reconstruction lente ; tout cela a entraîné des retards dans le domaine scolaire, dans l’économie, dans l’aménagement du territoire.

Et il reste encore des zones rouges ; les agriculteurs encore maintenant trouvent des grenades, des casques, des sapes…

LP : Y a-t-il des cas particuliers qui vous ont particulièrement frappé ?

JD : Celui de Maupas, que Philippe Gosselin a rappelé à l’Assemblée.

LP : Vous avez dit que c’était un des votes dont vous étiez le plus fier. Comment s’est-il passé ?

JD : Il aurait dû avoir lieu plus tôt. Mais il y a un conservatisme qui empêche de faire évoluer la situation. Commission défense : il ne se passe pas grand-chose et on ne savait pas que cela venait en séance. La position de mon groupe était : contre.

Arrivé dans l’hémicycle, on m’informe : « on vote contre » ; je réponds : « moi, je vote ce que je veux ».

C’était la fin de la session, une des dernières niches parlementaires ; il y avait peu de monde, cela a permis de faire bouger les lignes. Mais ce n’était pas gagné d’avance. L’intervention de Philippe Gosselin a été très importante. J’ai de mon côté convaincu des députés de mon groupe.

LP : Et la suite ?

JD : Pour obtenir la réhabilitation, il faut voir les sénateurs, expliquer ces situations de guerre, et les convaincre qu’il est temps de régler cette question ; ce sont des conservatismes dépassés ; il n’y a aucune raison de ne pas réhabiliter. Qu’aurions-nous fait à la place de ces soldats ?

Interview réalisée par Nicole Aurigny