L’éditorial :
Apprendre un peu de tout vaut mieux que de prendre un peu dans tout. (Dian Diallo)
Voici pour février un numéro varié qui m’a incité à prendre un peu dans tout pour le présenter. Nombreux sont les domaines de la raison.
Commençons par notre une, due au crayon toujours irrévérencieux du regretté Siné et à l’amabilité de Madame Catherine Sinet. Elle met en scène la moquerie des prêtres catholiques envers les « idoles païennes » des peuples premiers. Cela nous invite à nous souvenir que l’« évangélisation » de ces peuples fut inséparable de la colonisation le plus souvent brutale des puissances européennes. La tragédie récemment dévoilée des orphelinats catholiques d’enfants autochtones au Canada en est une manifestation parmi d’innombrables autres. Quoi de mieux que la poigne de fer de la soldatesque pour accompagner les coups de goupillon ? Dans toute l’Amérique centrale les bons prêtres ont brûlé des centaines de codex « diaboliques » des Mayas causant non seulement un préjudice aux populations locales mais un déficit énorme d’information pour les archéologues du futur. Quant à la culture Aztèque, tout ce qui était en or fut fondu, masques, bijoux, statuettes avec la bénédiction des prêtres accompagnant les conquistadors. Alors oui, hors de l’espace public les statues, vierges, calvaires et es et autres totems et grigris, et j’avoue ma préférence artistique pour les grigris et le merveilleux art africain ainsi que pour les magnifiques totems des Haïdas de la côte ouest du Canada et des Etats-Unis.
C’est à cette tentative de reconquista ultradroitière que nous consacrons notre dossier. Perpétuellement condamnés par toutes les juridictions y compris le Conseil d’Etat, les Ménard, Wauquier, Moreau et autres récidivent perpétuellement, se permettant de braver la loi. Sans doute un avatar de droite de la « désobéissance civique ». Cela s’accompagne de vociférations contre la Libre Pensée que nous prenons comme hommage du vice à la vertu. Comme nous l’affirmons dans le dossier
: « il faudra bien que les édiles qui bafouent la loi de 1905, au compte de leurs conceptions religieuses et qui dépensent sans compter les fonds publics dans un combat perdu d’avance, rendent des comptes un jour sur l’utilisation de l’argent des citoyens ». Je n’en dis pas plus, consultez notre dossier et vous aurez un panorama complet des menées de cette phalange cléricale activiste.
Changeons de sujet et de rubrique. Dans ce numéro nous célébrons deux prix Nobel français, non par patriotisme mal placé mais pour leur grand intérêt. L’un se situe dans le monde des belles lettres, c’est Annie Ernaux, l’autre dans celui des sciences « dures » c’est Alain Aspect. La première, écrivaine de grand talent, est célébrée par l’article enthousiaste de Pierre Guéguen, le second est commenté dans l’interview de Gregory Chaboussant que vous trouverez en rubrique « sciences ». Notre invité, lui-même chercheur physicien, souligne l’importance des expériences d’Alain Aspect pour la validation d’une interprétation de la mécanique quantique. Ce n’est pas rien !
Nous reproduisons en pages 22 et 23 l’article que Christian Eyschen a fait paraître dans Mediapart. La question de la guerre est de plus en plus prégnante. Elle ne profite jamais qu’aux capitalistes, on le sait depuis la première guerre mondiale. Le rappel du manifeste de Kienthal en 1916, « Aux peuples qu’on ruine et qu’on tue, prolétaires de tous les pays unissez-vous » apparait comme d’une brûlante actualité.
Dans notre rubrique « Ainsi va le monde », deux articles, a priori sans rapport paraissent ensemble : L’onde de choc du rapport de la CIASE en France frappe l’Italie de plein fouet. L’Eglise catholique tente encore de camoufler les crimes sexuels commis par des prêtres en ce pays à travers un rapport qualifié d’« humiliant » et d’ « inacceptable » par les associations de victimes. La déferlante frappe les murs mêmes du Vatican. D’un autre côté La National Secular Society, l’association de nos amis libres penseurs anglais nous apprend que le sentiment de sécularisation s’accroît dans le Royaume Uni au point qu’elle juge que l’heure du « désétablissement » de l’Église d’Angleterre a sonné, c’est-à-dire l’heure de la séparation de l’Église anglicane et de l’État. Tous les détails sont dans notre rubrique.
Enfin, soulignons qu’en dépit des lourdes casseroles qu’elle traine, l’Église catholique se permet encore de condamner le droit au suicide assisté au nom de sa « morale » médiévale. Notre communiqué de presse (page 26) fait justice de cette incroyable prétention.
Je vous souhaite bonne lecture.
Jean-Sébastien Pierre, Président de la Libre Pensée
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