Le néo-colonialisme universitaire, sous la Calotte et l’éteignoir. Quand le gouvernement finance la formation des futurs prêtres

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Mars et avril 2023 verront des centaines de milliers d’étudiants essuyer les plâtres d’une nouvelle plateforme de sélection pour l’entrée en Master, « Mon Master », conçue sur le modèle de Parcoursup pour organiser une mise en concurrence généralisée des étudiants… et des établissements dont les grades sont reconnus par l’État, qu’ils soient publics ou privés. Tous les étudiants doivent maintenant passer sous les fourches caudines de Mon Master pour trouver une place.

Tous ? Non ! Le système spécifique destiné à filtrer les étudiants extra-européens, ceux qui paient des frais d’inscription dérégulés, est maintenu. Tous les ans, à la rentrée, ce système bureaucratique et discriminatoire place pourtant les établissements sous-dotés et les étudiants extra-européens, notamment Africains, dans des situations sans issue qui défraient la chronique locale pendant des semaines. Mais il faut croire que leur sort n’intéresse pas les argentiers de l’Université française.

Ce qui vaut pour les étudiants extra-communautaires ordinaires ne vaut pas pour leurs futurs dirigeants présumés : dans la droite ligne d’une politique universitaire néo-coloniale, la France sait se montrer bonne fille avec les « futurs décideurs » des pays qu’elle cible, en mettant en place un accueil privilégié et des bourses à leur intention. Ces programmes spéciaux financent des mobilités dans les disciplines du droit, de la science politique et de l’économie ; mais il y a aussi des bourses en commerce et en management. Ce que l’on sait moins, c’est que ce gouvernement de Tartuffes jamais avares de leçons de laïcité finance des bourses d’études théologiques qui, d’un site institutionnel à l’autre, sont fréquemment renommées « bourses d’études pour religieux », ce qui a le mérite d’être clair : ces bourses s’adressent prioritairement aux futurs prêtres venant étudier leur religion en France. Oh les charmants « décideurs » que voilà !

La liste des établissements d’accueil présomptifs est publique. Certes, on y trouve des établissements respectables proposant un enseignement non-dogmatique en sciences des religions, comme l’École Pratique des Hautes Études. Mais le gros du panier est occupé soit par les facultés confessionnelles d’Alsace-Moselle, soit par les établissements privés catholiques, dont les grades sont reconnus par l’État depuis le pacte Sarkozy-Kouchner-Ratzinger de mai 2009. Le site de Campus France à Madagascar parle même d’« Université Catholique de Lyon », reprenant à son compte un terme de marketing employé en toute illégalité par cet établissement calotin, qui usurpe le titre d’université.

Le Ministère « de l’Europe et des Affaires Étrangères » a beau jeu de dire que la bourse est ouverte à toutes les confessions, quand on voit une telle liste on comprend facilement qu’il s’agit de maintenir à flot le culte catholique romain en subventionnant la formation de ses ministres. Ce gouvernement ne bafoue pas la laïcité qu’en France, il la piétine aussi à l’étranger, en contribuant matériellement à former les futures bureaucraties cléricales sur lesquelles le colonialisme s’est de tout temps appuyé.

Quel contraste entre cette générosité pour les futurs oblats et le lot quotidien des étudiants, venus de France ou d’ailleurs ! Quel gouffre entre le financement de la rente des facultés de théologie et la mise en faillite des universités publiques, dont le budget par étudiant n’en finit pas de plonger !

La Libre Pensée demande la fin des régimes étudiants néo-coloniaux, l’abrogation des subventions directes et indirectes à l’enseignement privé confessionnel et la dénonciation du pacte Sarkozy-Kouchner-Ratzinger de 2009. Elle exige un plan de financement, de recrutement et de construction pour une Université publique, gratuite, laïque et ouverte à tous !

A bas la Calotte,
à Paris comme à Rome !

Latran-sur-Seine, le 23 mars 2023