Annemasse le 27 octobre 2020, rassemblement autour du monument à Michel Servet

 

Discours de la Libre Pensée, prononcé le 27 octobre 2020, lors du rassemblement autour du monument à Michel Servet, à Annemasse :

 

Monsieur le Maire, mesdames et messieurs les élus,
Chers amis, chers camarades, citoyens,

Je vous remercie au nom de la Libre Pensée d’être présents ce jour, 27 octobre, jour- anniversaire du supplice de Michel SERVET, le 27 octobre 1553.

Nous entendons ici honorer sa mémoire au pied de sa statue.

C’est ici même que mercredi dernier nous étions rassemblés, pour Samuel Paty, 300 enseignants, parents, jeunes, citoyens et élus, en hommage à ce professeur d’histoire-géographie sauvagement assassiné par le fanatisme religieux. Malheureusement, cet assassinat nous montre qu’au 21ème siècle le combat pour la liberté de conscience est toujours actuel : c’est pour cela que la Libre Pensée s’honore à organiser chaque année, fidèlement, cet hommage à Michel Servet

 

Il est à noter que Michel Servet a été victime, non pas d’un jeune fanatique illuminé comme l’a été Samuel Paty, mais victime d’un crime d’État. Il a été condamné au cours d’un procès et exécuté sur les ordres du Conseil Général de la République de Genève, que dirigeait Jean Calvin. C’était un État théocratique, la religion était au pouvoir. A Genève régnait donc une confusion totale entre le pouvoir civil et le pouvoir religieux. Durant les seules cinq premières années de son « règne », treize personnes sont pendues, dix décapitées, et trente-cinq périssent sur le bûcher.

 

Donc, Michel Servet après avoir été jeté au cachot et avoir subi d’atroces souffrances et des tortures, fut brûlé vif sur un bûcher à Champel ; il avait 42 ans.

 

Poursuivi par l’Inquisition, Michel SERVET avait été déjà condamné à mort par contumace en France par l’Église catholique à Vienne dans le Dauphiné. En fuite, il avait été brûlé en effigie avec ses livres. En cavale donc, il était venu à Genève pour chercher refuge.

 

Bien plus tard, en 1942 sa statue en bronze qui avait été installée en 1908 à Annemasse par les libres penseurs, sera livrée par les autorités de Vichy aux allemands, sa statue sera fondue à Hambourg par les nazis pour en faire des canons.

On peut donc ainsi dire que Michel SERVET a été brûlé 3 fois, poursuivi impitoyablement par une haine tenace et obscurantiste.

 

Mais qui était-il pour mériter une telle persécution ?

 

Michel Servet était un humaniste et un homme de science. Il s’intéressait à tout : il étudia le droit, la théologie, les mathématiques, l’astronomie, la géographie, l’anatomie. A Paris, il étudie la médecine. Michel Servet était un savant.

Michel Servet découvrit la circulation sanguine, le passage du sang dans les poumons. Voilà ce qu’a écrit Voltaire: « Michel Servet, très savant médecin, méritait de jouir d’une gloire paisible, pour avoir, longtemps avant Harvey, découvert la circulation du sang » C’est un personnage connu, encore aujourd’hui, des étudiants en médecine.

 

Michel Servet était un esprit libre. Bien que moine catholique, il remet en cause les dogmes religieux. Pour cela, il s’appuie sur la raison et sur la science.

 

Il s’attaque au concept de la Trinité : Le Père, le Fils et le Saint Esprit. Un seul être ne peut être à la fois un Dieu, un homme et un esprit. C’est contraire à la Raison.

 

Servet remet en cause aussi le baptême des enfants. Il estime que, pour être baptisé, il faut être conscient de ce que l’on fait. Il repousse la théorie du péché originel. Il replace Dieu dans la nature. Comme médecin, il pratique des dissections sur des cadavres pour faire avancer la recherche. Tous les fondements du christianisme sont remis en cause.

 

Il occupe les fonctions de médecin de l’Archevêque de Vienne dans le Dauphiné. Là, il fut dénoncé comme hérétique. Il est arrêté et emprisonné mais il parvient à s’échapper. Il sera condamné à mort par contumace et brûlé en effigie avec ses livres par les catholiques à Vienne.

 

D’autres, comme lui, ont été persécutés et suppliciés pour leurs opinions.
Ainsi Galilée qui ne reconnaissait pas que la terre est plate. Le mathématicien et philosophe italien, Giordano Bruno fut brûlé à Rome en place publique en février 1600.
Etienne DOLET humaniste et imprimeur de Rabelais , fut étranglé et brûlé place Maubert à PARIS en 1546.
Puis, en 1766, ce sera le tour du chevalier de La Barre qui fut exécuté et brûlé pour avoir refusé d’enlever son chapeau au passage d’une procession religieuse.

 

Tous ces crimes d’État et ces persécutions n’ont pu se produire que dans des sociétés qui n’étaient pas organisées par le principe de laïcité. Le pouvoir civil et le pouvoir religieux sont confondus. Là où il n’y a pas de Séparation des Églises et de l’État , il n’y a que persécutions, massacres et guerres de religion…
C’est pour éviter cela que la loi de 1905 établit la République laïque – qui garantit la liberté de conscience des citoyens et par conséquent la paix civile.

 

Article 1 : La République assure la liberté de conscience et garantit la liberté des cultes.

Article 2 : La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte…

 

Aujourd’hui, la Libre Pensée avec d’autres organisations laïques est au cœur de la résistance pour défendre et faire appliquer la Loi de 1905. Elle s’oppose à la volonté du président de la République, chanoine du Latran, de « réparer le lien entre l’Eglise et l’Etat » qui se serait abîmé. Discours au Couvent des Bernardins du 9 avril 2018.

La Libre Pensée s’oppose au projet de loi sur le séparatisme qui vise à organiser un culte, financer l’islam et former les imams de France sur la base d’un nouveau Concordat.

La Libre Pensée mène campagne et a constitué un Front laïque de 11 associations et syndicats contre le financement public de la construction d’une « université catholique à Annecy, contre les subventions de 5 millions d’euros d’argent public qui manque cruellement à l’Éducation Nationale.

 

Un aspect fondamental relie l’assassinat de Samuel Paty et l’exécution de Michel Servet: ce sont les connaissances et le savoir qui sont attaqués, aujourd’hui c’est l’École et ses enseignants qui sont visés.

La Libre Pensée se réclame des Lumières, de la Raison et de la Science. On ne peut combattre l’obscurantisme que par les connaissances, le savoir rationnel.

  • Défendre l’école aujourd’hui, c’est rétablir les contenus disciplinaires, rétablir les diplômes nationaux et le Bac, abroger les réformes qui dénaturent l’école et la transforme en garderie.
  • défendre les enseignants c’est rétablir les 1800 postes d’enseignants de collège qui ont été supprimés cette année par le Gouvernement
  • défendre la liberté d’expression, c’est abroger la réforme du ministre Blanquer qui institue « un devoir d’exemplarité » pour les enseignants, qui ne peuvent plus critiquer la politique de leur ministre sans s’exposer à des sanctions disciplinaires..

 

Je vous remercie de votre attention.

 

Télécharger ce discours