Élevé avec sa sœur à Orléans par un père juif et une mère protestante, Jean Zay vit avec le protestantisme dès son plus jeune âge. Il effectue toute sa scolarité au lycée Pothier. Excellent élève, il s’illustre en remportant de nombreux prix, notamment en français. Il devient journaliste au Progrès du Loiret, et poursuit des études de droit. En 1928, il est nommé avocat au barreau d’Orléans. Très tôt, Jean Zay est attiré par la politique. A seulement vingt-sept ans, il devient député. En janvier 1936, il est nommé sous-secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil. Membre actif du Front Populaire, Jean Zay devient ministre de l’Éducation nationale, soutenu par Léon Blum. Entre 1936 et 1939, il œuvre activement pour la démocratie dans le domaine scolaire et en faveur des activités extra scolaires, travaillant en collaboration avec Léo Lagrange. A partir de 1939, il s’engage sur le front, puis gagne l’Afrique du Nord, avec notamment Pierre Mendès France. Opposant au régime de Vichy et ’déserteur’, il est arrêté le 14 août 1940, à Rabat au Maroc. Ramené en France à Clermont-Ferrand, il y est jugé et condamné à la déportation, avant d’être incarcéré à Marseille, puis à Riom. Mais en juin 1944, il est kidnappé et assassiné par la milice, qui abandonne son corps dans un bois. L’année suivante, Jean Zay est réhabilité à titre posthume.
Circulaire du 31 décembre 1936
« Mes prédécesseurs et moi –même avons appelé déjà à plusieurs reprises votre attention sur les mesures en vue d’éviter et de réprimer toute agitation de source et de but politiques dans les lycées et collèges. Un certain nombre d’incidents récents m’obligent à revenir encore sur ce sujet d’importance capitale pour la tenue des établissements d’enseignement du second degré et d’insister d’autant plus que des modes coutumiers d’infraction font place à des manoeuvres d’un genre nouveau.
Ici le tract politique se mêle aux fournitures scolaires. L’intérieur d’un buvard d’apparence inoffensive étale le programme d’un parti. Ailleurs, des recruteurs politiques en viennent à convoquer dans une « permanence » un grand nombre d’enfants de toute origine scolaire, pour leur remettre des papillons et des tracts à l’insu, bien entendu, de leurs parents et les envoyer ensuite les répandre parmi leurs condisciples.
Certes les vrais coupables ne sont pas les enfants ou les jeunes gens, souvent encore peu conscients des risques encourus et dont l’inexpérience et la faculté d’enthousiasme sont exploitées par un esprit de parti sans mesure et sans scrupule. Il importe de protéger nos élèves contre cette audacieuse exploitation. A cet effet, toute l’action désirable devra être aussitôt entreprise auprès des autorités de police par MM. les chefs d’établissements, les inspecteurs d’académie et vous –mêmes.
On devra poursuivre énergiquement la répression de toute tentative politique s’adressant aux élèves ou les employant comme instruments, qu’il s’agisse d’enrôlements directs ou de sollicitations aux abords des locaux scolaires. Je vous rappelle que les lois et règlements généraux de police permettent sans conteste aux autorités locales d’interdire les distributions de tracts dans leur voisinage lorsqu’elles sont de nature à troubler l’ordre, tout spécialement quand le colportage est l’oeuvre de mineurs non autorisés. Une circulaire de M.le ministre de l’Intérieur, en date du 20 mai 1936, a précisé en cette matière les pouvoirs de l’autorité administrative. Il conviendra, le cas échéant, d’appeler sur ce texte l’attention de MM.les préfets.
Eventuellement aussi, on indiquera aux parents qu’un recours leur est ouvert contre les personnes se trouvant, par leur intervention, à la source des sanctions prises contre les enfants. Quant aux élèves, il faut qu’un avertissement collectif et solennel leur soit donné et que ceux d’entre eux qui, malgré cet avertissement, troubleraient l’ordre des établissements d’instruction publique en se faisant à un titre quelconque les auxiliaires de propagandistes politiques, soient l’objet de sanctions sans indulgence. L’intérêt supérieur de la paix à l’intérieur de nos établissements d’enseignement passera avant toute autre considération.
Toute infraction caractérisée et sans excuse sera punie de l’exclusion immédiate de tous les établissements du lieu où elle aura été commise. Dans les cas les plus graves, cette exclusion pourra s’étendre à tous les établissements d’enseignement public. Tout a été fait dans ces dernières années pour mettre à la portée de ceux qui s’en montrent dignes les moyens de s’élever intellectuellement. Il convient qu’une expérience d’un si puissant intérêt social se développe dans la sérénité. Ceux qui voudraient la troubler n’ont pas leur place dans les écoles qui doivent rester l’asile inviolable où les querelles des hommes ne pénètrent pas ».
Circulaire du 15 mai 1937
« Ma circulaire du 31 décembre 1936 a attiré l’attention de l’administration et des chefs d’établissements sur la nécessité de maintenir l’enseignement public de tous les degrés à l’abri des propagandes politiques. Il va de soi que les mêmes prescriptions s’appliquent aux propagandes confessionnelles. L’enseignement public est laïque. Aucune forme de prosélytisme ne saurait être admise dans les établissements. Je vous demande d’y veiller avec une fermeté sans défaillance ».
Nous publions ces deux circulaires en relation avec la loi de 1999, puis celle de 2004 sur l’interdiction du port de signes « ostentatoires » ou « ostensibles », prétendant permettre aux élèves des écoles, collèges et lycée de manifester leurs opinions par des « signes discrets ».
Si on avait réellement voulu régler le problème dans un esprit de pacification, on aurait parfaitement pu ressortir ces deux circulaires qui n’ont pas avquis une ride.
On a préféré faire un texte stigmatisant en fait les seuls porteurs (ses) de voile. cette loi ne règle rien, donc, au contraire, elle est à tout moment facteur d’explosion de l’institution scolaire.