La Raison n°618 – février 2017

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Editorial

Pour le respect commun de la laïcité

La laïcité est et doit rester un principe qui repose, comme le précise la loi de 1905 de Séparation des Eglises et de l’Etat, sur l’affirmation de la liberté de conscience et le libre exercice des cultes dans le respect de l’ordre public d’un côté et l’affirmation d’une
stricte neutralité confessionnelle de l’Etat de l’autre. La réduire à une valeur, comme certains le souhaitent, conduit à en faire une idéologie susceptible de tous les travestissements, comme c’est le cas aujourd’hui avec les défenseurs d’une laïcité de repentir ou, plus grave, d’une laïcité identitaire et volontiers xénophobe.

L’extrême droite, véhicule d’une tradition antilaïque, adversaire de toujours des progrès opérés au nom de la laïcité en matière d’état des personnes et de libertés, individuelles et collectives, s’est emparée du mot en le soumettant à sa lecture idéologique pour en faire un instrument de contrainte et de conformation. Elle vise à imposer une capitulation de tout ce qui ne correspond pas à la vision identitaire qu’elle veut imposer de la société, chacun étant sommé de renoncer à ce qu’il est ou donne à voir, au nom une vision fantasmée d’une identité nationale réduite à un médiocre roman national, dont l’inexactitude n’a d’égale que la prétention normative. Hier, c’était les juifs ou les arabes. Aujourd’hui, ce sont les musulmans. L’hostilité au mariage pour tous ou au Planning familial voisine, avec une haine de toute manifestation, d’une singularité religieuse qui blesse leur
regard. Ce qui se laisse voir sur les têtes leur est toujours apparu plus important que ce qui se tramait dans les têtes.

Un certain nombre de médiocres supplétifs, qui murmurent leur hostilité à certaines de ses outrances, servent de relai à ses diatribes contre toute affirmation visible d’une diversité sociale et cultuelle. Il importe de le redire, la pratique d’aucun culte, pas plus l’Islam aujourd’hui que le catholicisme hier, n’est incompatible avec la laïcité. Catholiques, musulmans, juifs, athées et agnostiques ont le même droit de partager et d’exprimer leurs convictions, dans les limites d’un ordre public démocratiquement défini et dont le respect est placé sous le contrôle d’un juge.

Nous, militants laïques, par-delà les divergences d’analyse dont l’expression constitue la traduction la plus éclatante de notre attachement à une démarche d’émancipation et de progrès, appelons à la constitution d’un front commun attaché à promouvoir cette intelligence laïque que recèle la loi de 1905.

Conservons la fonction d’émancipation de la laïcité dans un espace démocratique. Dénonçons sans faiblesse les travestissements et récupérations dont ses adversaires de toujours se rendent quotidiennement coupable afin de favoriser l’émergence d’une société de liberté, de justice et de fraternité.

Jean-Michel Ducomte, Président de la Ligue de l’Enseignement
Jean-Sébastien Pierre, Président de la Fédération Nationale de la Libre Pensée

L’Appel « Pour le respect de la laïcité » a été proposé à la signature de tous ceux qui se réclament de la laïcité. Bien entendu, il ne peut intégrer ce que pense tout le monde, mais rien de ce qu’il contient ne peut trouver désaccord pour un authentique partisan de la loi de 1905. Ceux qui aspirent à l’union la plus large des militants de la laïcité l’ont donc contresigné sans problème.
Cet Appel a reçu la signature des responsables des principales associations laïques, syndicales,
mutualistes, de l’économie sociale. Il n’y a eu de notre part aucun ostracisme, aucune exclusive. Il y a bien longtemps qu’un tel Appel des Laïques, n’avait pas connu un écho si important.

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