Editorial
Un congrès extraordinaire : La Libre Pensée internationale à Paris
Tous ceux qui ont assisté au VIIème congrès mondial de l’AILP (Association Internationale de la Libre Pensée) en garderont un souvenir ineffaçable. Il marque une nouvelle avancée de l’association au niveau mondial. Selon les mots de Christian Eyschen, porte-parole de l’AILP, il y aura un avant et un après Paris.
Il est clair, tout d’abord, que ce retour à Paris, cent douze ans après le congrès international de 1905 et cent treize ans après celui de 1904 à Rome, a suscité un fort enthousiasme de toutes les organisations que nous avons côtoyé depuis Oslo. Sans aucun patriotisme mal venu, Paris incarne l’achèvement d’une loi de Séparation des Églises et des États qui reste un objectif pour les associations de libres penseurs, d’athées, d’humanistes et de rationalistes du monde entier. Ils sont donc venus avec leurs aspirations, leurs expériences, leurs combats, leurs traditions, et cette rencontre fut exaltante.
Exaltante d’abord par les lieux prestigieux de son déroulement. Ce fut d’abord la salle Ambroise Croizat de la Bourse du Travail, avec son hémicycle, ses colonnes de fonte typiques de l’architecture industrielle de cette fin du XIX ème siècle, les blasons des métiers qui l’ornent, et l’ensemble de chaires en bois ouvragé permettant et de présider et de discourir. Ce haut lieu du mouvement ouvrier a été salué comme il se doit à l’ouverture du congrès. Le lendemain, ce fut l’impressionnante salle d’honneur de la mairie du 10ème arrondissement, avec ses colonnades, ses fresques républicaines et son haut plafond richement orné. Enfin, la session sur la science eut lieu dans un amphithéâtre historique de la prestigieuse et respectée École Normale Supérieure de la rue d’Ulm.
Avant le congrès, eut lieu le colloque de l’IRELP (Institut de Recherches et d’Etudes de la Libre Pensée). Il fut, selon le mot de son Président Jean-Marc Schiappa, l’ouverture (comme à l’opéra) du 7ème congrès, et nombre d’associations déléguées étaient déjà présentes. Il ne saurait être question d’en donner un compte rendu dans ce bref éditorial, mais les interventions, d’une extrême qualité, ont été suivies avec une attention passionnée par une salle archicomble. Son thème, “Libre Pensée et Libres Penseurs hier et aujourd’hui”, a été décliné de par le monde et de par l’histoire, avec brio.
Après une séance introductive où le congrès a reçu les salutations d’organisations internationales d’envergure : l’IHEU (Union internationale Humaniste et Laïque), la FHE (Fédération Humaniste Européenne), le CFI (Sceptiques), le CLIPSAS (Comité de Liaison internationale des Puissances maçonniques signataires de l’Appel de Strasbourg), des associations membres de l’AAI (Alliance Athée Internationale) étaient présentes et ont manifesté leurs désirs de travailler étroitement avec l’AILP. Il est à noter que Richard Dawkins, brillant évolutionniste anglais et militant de l’athéisme, a envoyé, par la voie du CFI, le salut de sa fondation au congrès. Ce désir commun d’agir ensemble aura des prolongements importants prochainement.
Les participants ont pu entendre les rapports introductifs sur les campagnes décidées par l’AILP. Ces rapports ont fait l’objet d’une riche discussion lors de la séance du samedi matin.
Les trois thèmes mis à l’étude ont pu être traités en profondeur, et si toutes les communications étaient dignes du plus grand intérêt, je ne peux m’empêcher de retenir la poignante intervention de Babu Cogineni sur la situation de la femme en Inde et la belle communication de Jean-Luc Romero sur les obstacles au droit de mourir dans la dignité en France. Sur ce sujet, nos amis belges et suisses ont pu montrer que des avancées législatives considérables existent dans plusieurs pays d’Europe et permettent de juger d’une expérience de plusieurs années réduisant à néant les imprécations des Églises contre ce droit fondamental. Le délégué irlandais, faisant part de sa tragique expérience personnelle dans un pays écrasé par l’Église catholique, a douloureusement ému l’assistance entière. La session sciences est revenue sur les problèmes du créationnisme, de la soi-disant bioéthique et sur les rapports science-société.
Enfin, le Conseil International a adopté le texte “violence et religions”, fruit d’une large discussion internationale, et que vous trouverez en page 15 du présent numéro. Chers lecteurs, vous aurez bientôt accès aux actes de cet inoubliable 7ème congrès de l’AILP à Paris. Il a constitué un moment de chaleureuse rencontre et d’échanges précieux, ne manquez surtout pas la publication de ses travaux. La Libre Pensée remercie toutes celles et tous ceux qui nous ont aidé pour ce succès.
Jean-Sébastien Pierre,
Président de la Fédération Nationale de la Libre Pensée