Crèches dans les mairies : De Beaucaire à Sorgues, la jurisprudence laïque se dessine

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Le 16 mars 2018, le Tribunal administratif de Nîmes a rendu quatre jugements par lesquels il a, d’une part, sur recours de la Libre Pensée et de la Ligue des droits de l’Homme et du citoyen, annulé les décisions du maire Front national de la commune de Beaucaire d’installer une crèche de la Nativité sous l’escalier d’honneur de l’Hôtel de ville, en décembre 2014, 2015 et 2016, d’autre part, rejeté le recours pour excès de pouvoir introduit par M. Pierre Salle tendant à obtenir le même résultat à propos de celle exposée dans une salle polyvalente du centre administratif de Sorgues, en 2016.

En ce qui concerne les trois premières affaires, le Tribunal administratif de Nîmes a appliqué strictement la jurisprudence du Conseil d’État du 6 novembre 2016 (Voir CE, 9 novembre 2016, Commune de Melun, n° 395122 et CE, 9 novembre 2016, Département de la Vendée, n° 395223). La présence d’une crèche de la Nativité dans un bâtiment public, siège d’une collectivité publique, est contraire aux dispositions combinées des articles, d’une part, 1er de la Constitution, d’autre part, 1er, 2 et 28 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la Séparation des Église et de l’État. Les juges de Nîmes ont ainsi confirmé une désormais abondante jurisprudence sanctionnant la violation, par plusieurs maires et un Président de région, des principes laïques énoncés par les textes sus-rappelés.

En ce qui concerne la dernière affaire, le Tribunal administratif de Nîmes a fait application de la dérogation au principe d’interdiction de crèches dans les bâtiments publics. En effet, le Conseil d’État a jugé que celles-ci peuvent revêtir une autre signification que religieuse dès lors qu’elles présentent « un caractère culturel, artistique ou festif ». En l’espèce, bien que la crèche litigieuse fût installée dans une enceinte publique, le juge administratif a considéré que sa présence s’inscrivait dans une animation plus vaste, sans caractère religieux selon lui, Noël à Sorgues, comportant un spectacle sons et lumières et une grande parade, et qu’elle était attestée depuis quatorze ans.

La Fédération nationale de la Libre Pensée observe que la jurisprudence du Conseil d’État du 9 novembre 2016 permet, pour l’essentiel, de faire barrage à la multiplication des crèches de la Nativité dans les services publics, même si la dérogation qu’elle permet parfois se fonde sur des circonstances de fait toujours discutables.

La Libre Pensée attire l’attention des laïques sur le fait qu’il ne faut jamais laisser une « tradition » antilaïque perdurer. Il faut agir dès la première apparition d’un symbole religieux, et ne pas hésiter à contacter la Fédération nationale de la Libre Pensée pour envisager les démarches nécessaires. Il faut veiller à se donner toutes chances juridiques pour gagner, afin de ne pas renverser la jurisprudence laïque qui est en train de se constituer.

Paris, le 1er avril 2018