Aides publiques très généreuses pour le Consistoire israélite de France

Le 29 octobre 2019, en présence de huit cents personnes, le Président de la République assiste à l’inauguration du Centre européen du judaïsme (CEJ), un ensemble immobilier de près de 5 000 m² édifié dans le périmètre de l’ancienne zone d’action concertée de la porte de Champerret. Celui-ci comprend une synagogue de six cents places, ainsi que deux immeubles affectés aux activités institutionnelles et culturelles du culte israélite. Le Consistoire israélite de Paris et d’Île-de-France y occupe d’ailleurs des bureaux.

Bien que l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la Séparation des Églises et de l’État dispose que « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte », en l’espèce, non seulement le Président a fait se pencher à tort la République sur le berceau du CEJ, mais les collectivités publiques ont fait preuve d’une extrême générosité en faveur des promoteurs du centre.

Des aides directes confortables de l’État et de la région

En premier lieu, alors même que les dons des fidèles font déjà légalement l’objet d’un abattement fiscal, soit ici une somme de cinq millions d’euros environ sur les huit versés par des fondations et des mécènes au Consistoire de Paris, l’État aurait accordé au surplus, selon une information publiée dans l’édition “laïcité”, animée par la Ligue de l’enseignement, dans le journal électronique Médiapart du 10 juin 2020, une aide directe de deux millions d’euros et la région une autre d’un million – probablement au titre des activités présumées « culturelles » comme l’avait fait en son temps Jack Lang pour le musée d’art sacré, désespérément vide, de la cathédrale d’Évry. Néanmoins, une contribution encore plus massive de la Ville de Paris complète celles de l’État et de la région.

Une aide indirecte très importante de la Ville de Paris

En second lieu, en effet, en dépit des maladresses juridiques ayant retardé le dénouement de l’affaire, la Ville de Paris a consenti, sur le fondement des articles L. 251-1 à L. 251-9 du Code de l’habitation et de la construction, un bail à construction très avantageux à l’association consistoriale israélite de Paris (ACIP).

Le projet remonte à 1991 : par une délibération du 27 mai le Conseil de Paris présidé par Jacques Chirac déclasse du domaine public, aux fins de l’aliéner ou d’en donner la jouissance à un tiers par emphytéose, le terrain qui supporte désormais le CEJ. Près de dix ans plus tard, le 29 janvier 2001, cette instance décide de consentir un bail à construction au Consistoire israélite de Paris et d’Île-de-France. Le 22 novembre 2006, en application d’une délibération des 3 et 4 avril précédents, la Ville de Paris signe une promesse de bail à construction avec l’ACIP. Néanmoins, cette promesse ne devient effective qu’en 2013 : la Ville de Paris avait omis de désaffecter la parcelle convoitée à sa destination scolaire. Cette erreur est réparée en 2013 seulement, par un arrêté du 24 juillet, après avis favorable du préfet et du recteur.

Malgré la lenteur de la procédure administrative aboutissant à la conclusion du bail à construction en 2013, les stipulations financières du contrat, d’une durée de quatre-vingt-dix-neuf ans, demeurent celles initialement prévues en 2006. D’une part, l’ACIP bénéficie d’une franchise de loyer durant la période de réalisation des travaux. D’autre part, la redevance exigée de l’ACIP paraît nettement sous évaluée. Elle s’élève à 50 000 euros par an en prix de base, soit 10 euros du mètre carré bâti. Il s’agit d’un prix d’ami. À titre de comparaison, la Ville de Paris a conçu un dispositif ingénieux d’accession à la propriété dans Paris de familles relativement modestes pour un prix de 5 000 euros le mètre carré seulement.

Pour parvenir à ce résultat, le foncier nécessaire à l’édification des immeubles fait l’objet d’un bail à construction de quatre-vingt-dix-neuf ans avec les opérateurs dont le loyer incombe aux acquéreurs des logements. Il est fixé à 24 euros par an et par mètre carré bâti, soit 2,4 fois le montant de celui exigé de l’ACIP. Sur la durée du bail et compte tenu de la franchise de loyer, la Ville de Paris consent ainsi une aide indirecte qui peut être estimée à plus de sept millions d’euros.

Un pactole total de dix millions d’euros

En définitive, la somme des aides publiques accordées au Consistoire israélite de Paris et d’Île-de-France, au travers de l’ACIP, ressort à quinze millions d’euros, dont dix millions en violation de la loi du 9 décembre 1905 concernant la Séparation des Églises et de l’État, même si le Conseil d’État a pu juger, en méconnaissance de son article 2, qu’était admissible un loyer d’un euro symbolique pour l’octroi pendant un siècle de droits réels immobiliers à une association musulmane cherchant à construire une mosquée (voir CE, 19 juillet 2011, n° 320796).

Garantir leur pleine liberté de conscience aux individus dans le régime de Séparation impose aux collectivités publiques d’employer l’impôt uniquement pour l’intérêt général et non en faveur d’intérêts religieux particuliers. C’est pourquoi la Fédération nationale de la Libre Pensée interpelle les responsables de ces collectivités :

RESPECTEZ LA LOI DU 9 DÉCEMBRE 1905 !
NE TOUCHEZ PAS À LA LOI DU 9 DÉCEMBRE 1905 !

Paris, le 15 juin 2020

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