« LA RAISON » DE JUIN EST PARUE

L’Editorial de Jean-Sébastien Pierre : Président, nous voilà ! Dzim, Boum !

« Camarades, ai-je besoin d’assurer que je suis depuis toujours acquis à la revendication qui s’affirme dans notre meeting de ce soir :

– Libération de tous les objecteurs de conscience emprisonnés.

– Abrogation du service militaire obligatoire ou autre. »

Ces mots émanent-ils de quelque leader anarchiste ou socialiste dans le style Jaurès ? Non, vous verrez dans notre dossier qu’ils sont dus à André Breton, poète, écrivain et inventeur du surréalisme en France. Ils furent prononcés lors d’un meeting à la Mutualité en octobre 1949 et publié dans Le Libertaire. Qui a dit qu’André Breton était l’honneur des poètes ? Je l’approuve. C’était treize ans avant que Louis Lecoin arrache le statut des objecteurs de conscience mais dix-neuf ans et une guerre après que la Libre Pensée se prononce pour ce statut.

Pourquoi consacrer le dossier central de La Raison à cette question de l’objection de conscience ?

Parce qu’avant même que la jeunesse soit officiellement soumise à l’obligation du Service National Universel, universel par sa portée (ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés, disait Jean de La Fontaine) et militaire par son esprit, le droit à l’objection de conscience leur est dénié par Madame Sarah El Haïry secrétaire d’État chargée de la Jeunesse et du Service national universel dans le gouvernement Élisabeth Borne. Elle a confié cela à une délégation du syndicat FSU qui exposait son opposition à ce service. La raison : Le SNU n’implique pas le port d’armes.

Soyons parfaitement clairs : avec les deux collectifs qui refusent le SNU, la Libre Pensée réclame tout d’abord et inconditionnellement l’abandon total du projet mais elle prévient : si Macron et son gouvernement avaient l’audace de rendre ce séjour militarisé obligatoire, alors nous exigerions la reconnaissance du statut d’objecteur de conscience.

Parce que, port d’armes ou pas, le Service National Universel est un entraînement militaire. Sous le nom pudique de « parcours d’obstacles » c’est bel et bien le parcours du combattant qui va être imposé à filles et garçons de 15 à 17 ans. Le lever à 6h30, le salut au drapeau, la Marseillaise qui, grâce aux Versaillais écrasant la Commune de Paris, s’est muée de chant révolutionnaire en hymne guerrier, tout cela est une préparation militaire, pour la guerre et pour faciliter le recrutement dans l’armée de métier !

Abandon du SNU !

Statut d’objecteur de conscience s’il venait à être imposé !

Une fois n’est pas coutume, je vais citer le poème de Louis Aragon « Il n’y a pas d’amour heureux ». Que les mânes d’André Breton me pardonnent !

« Sa vie, elle ressemble à ces soldats sans armes,

Qu’on avait habillés pour un autre destin

De quoi peut leur servir de se lever matin ? »

Soldats sans armes, mais obéissant aux ordres, respectueux de l’autorité, de la constitution de la 5ème République, habitués à marcher au pas et – peut-être – d’accepter de servir de chair à canon pour des intérêts qui ne sont pas les leurs.

Notre communiqué à ce sujet est parfaitement clair. Que serait la Libre Pensée si elle ne militait pas pour le droit de dire non jusque sous l’uniforme ? Pourquoi le refus réitéré de la réhabilitation des Fusillés de la Première Guerre mondiale et l’instauration du SNU ? Pour les mêmes raisons fondamentales : faire que le citoyen n’en soit plus un dès lors qu’il est sous l’uniforme, préparer des cohortes de jeunes soldats dressés à l’obéissance aveugle. C’est l’honneur de la Libre Pensée d’avoir exigé le statut d’objecteur dès les années 20, c’est son honneur actuel de le revendiquer quoi qu’il arrive.

Chose extraordinaire, la jeunesse n’est pas seule à être touchée.

Sébastien Lecornu, le brave à trois poils qui occupe les fonctions de ministre des Armées, parle d’étendre l’âge des réservistes à 70 et même 72 ans. À quand Grand papa et petite fille ou petit-fils dans la même compagnie ?

Papy à l’informatique ou aux drones et Mariette à la mitrailleuse ? Quel avenir nous préparent-ils ! Celui de la guerre et de ses horreurs pour anéantir les forces productives et restaurer le taux de profit. Il est heureux que le peuple dans son ensemble s’affronte à ce pouvoir-là.

Jean-Sébastien Pierre,

Président de la Fédération Nationale de la Libre Pensée


DANS CE NUMERO, outre les rubriques habituelles, on pourra lire notamment :

  • Notes de lecture : Mardi Sanglant ; Gracchus Babeuf 
  • Il y a cent ans : Agitation autour de l’occupation de la Ruhr
  • Crimes de l’Eglise : Interview de Keith Porteous Wood, Rapporteur spécial à l’ONU
  • Sciences : La cryptozoologie est-elle une science ?
  • Pacifisme ; Contre le SNU et la militarisation de la jeunesse et de la société
  • Dossier : Objection de conscience
  • Philosophie : Ce que Marx doit à Hegel
  • Littérature : Laurent Angliviel de La Beaumelle 
  • AILP : Pour la Séparation des Eglises, Religions et des Etats !
  • Appel contre les violences policières de l’Etat
  • Arts : Viollet-le-Duc