À propos de la disparition de Robert Badinter

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Robert Badinter

La disparition de Robert Badinter, ancien ministre de la Justice et abolitionniste de la peine de mort dans ce pays, est un fait politique. Comme tout fait politique, elle a été l’objet de commentaires et de manœuvres, à dire vrai assez sordides.

Pour nous, il n’y a ni ambiguïté ni échappatoire : Robert Badinter a fait abolir la peine de mort et, à ce titre, mérite un hommage appuyé. Il s’inscrivait dans la continuité des Robespierre, Victor Hugo, Jean Jaurès. Qu’il ait fallu attendre 1981 montre l’étendue (ou la limite) de la prétendue civilisation française. Insistons, Robert Badinter mérite tout notre respect pour cette abolition.

Cela étant, toutes les actions politiques, toutes les prises de position de Robert Badinter ne méritent pas nécessairement, loin s’en faut, le respect que l’on doit à son combat contre la peine de mort.

Et c’est ici que commencent manœuvres et turpitudes.

Robert Badinter mort, on parle à sa place.

A commencer par l’inénarrable Emmanuel Macron, tout heureux de trouver quelqu’un à qui rendre hommage. C’est le vice se parant de la vertu. Le vice des vivants et la vertu des morts. Macron rend hommage à peu près n’importe qui. Tel scientifique, tel acteur, telle chanteuse, les victimes du 7 octobre. A peu près tout le monde. Mais quand on rend hommage à tout le monde et qu’on oublie dans la liste des personnes devant qui on s’incline, les hommes, les femmes, les enfants de Palestine, ce n’est pas seulement une faute de goût et une basse manœuvre politicienne, cela a un nom : Le racisme.

Avec un sens de la propriété privée qui est celui des grands capitalistes, la veuve de Robert Badinter, Elisabeth Badinter, principale actionnaire du groupe de publicité Publicis (chiffre d’affaires de près de 15 milliards d’euros en 2023, excusez du peu) a décidé que la mémoire de Robert Badinter était sa propriété personnelle et non une part du Patrimoine de l’Humanité.

Avec le même sens de la pudeur propre à ces groupes capitalistes, Elisabeth Badinter a parlé de morale, excluant La France Insoumise du champ moral qui est le sien et prétendant chasser LFI de l’hommage qui était rendu à Robert Badinter. Certes, certes. LFI a agi comme elle l’entendait. Tel n’est pas notre propos.

Mais Elisabeth Badinter parle de morale, condamne l’Islamisme politique, condamne LFI. Un fait cependant gâche cette morale évanescente et béate. Le groupe Publicis dont Mme Badinter est, rappelons-le, la principale actionnaire, est responsable de la communication de l’Arabie Saoudite, grande démocratie féministe et égalitaire, comme chacun le sait (« Comment l’Arabie Saoudite veut redorer son image en France », Challenges, 1er avril 2016).

C’est bien évidemment ce sens aigu de la morale (et des affaires) qui permet à Madame Elisabeth Badinter de distribuer les titres d’honorabilité.

Nous ne mangeons pas de ce pain-là.

Nous rendons hommage sans payer tribut.

Jean-Marc Schiappa

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